"Les scarabées de cœur et les pectoraux tiennent une place particulièrement importante dans la parure des momies de Tanis" précise Christiane Ziegler dans "Tanis l'or des pharaons".
"Une 'corniche cavetto' simulant la forme de roseaux dépassant d'un mur de briques, est disposée au sommet, avec au centre un disque solaire ailé flanqué de cobras dressés" indique Zahi Hawass dans "Ramsès & l'or des pharaons".
Sa partie basse est occupée par une frise gravée, composée de deux signes de protection, associés respectivement à Osiris et Isis, répétés en alternance par neuf fois. Il s'agit du pilier-Djed qui est une amulette osirienne, symbole de stabilité, présente en Égypte depuis les temps les plus reculés et du "nœud d'Isis (Tit) qui est, lui, assimilé au sang et au pouvoir magique d'Isis" (Isabelle Franco, "Dictionnaire de mythologie égyptienne").
Le motif principal de la scène qui prend place au centre est un gros scarabée ailé. Le corps du coléoptère, généreusement bombé, est joliment sculpté dans du jaspe vert que l'on imagine parfaitement poli. Le corselet et les élytres sont matérialisés par des lignes incisées.
Le scarabée, symbole de renouveau (qui est là conjugué à la couleur verte associée à la vitalité) occupe une place prépondérante dans le rituel funéraire. Gaston Maspero, ("Guide du visiteur du musée de Boulaq", 1883) nous en explique ainsi les raisons : "Le scarabée, pris comme emblème divin, représentait Khopri, le soleil levant, le soleil qui se produit (khoprou) au matin de chaque jour, et qui renaît après être mort le soir du jour".
Il accompagnait le défunt dans son voyage dans l'au-delà afin de l'aider dans sa renaissance … Lors de la momification, lorsque le cœur - siège de la pensée, de la conscience - était enlevé, il était remplacé par un "scarabée de coeur". Sur ce bijou, généralement façonné dans une pierre dure, était inscrit le chapitre 30 du Livre des Morts qui enjoignait le cœur à être "juste" lors de la psychostasie. Après avoir été "oint" par deux fois par les embaumeurs, il était déposé sur la poitrine du défunt, ou bien "inclus" au motif d'un pectoral.
Le scarabée est pourvu d'ailes imposantes, réalisées selon la technique du cloisonné mais dont les incrustations ont majoritairement disparu.
Chechonq II, souverain de l'époque libyenne, est demeuré relativement obscur. Il pourrait avoir perdu la vie vers sa vingtième année et dans "Trésors d'Egypte au musée du Caire", Etienne Scheltraete indique d'ailleurs que ce "grand prêtre d’Amon du début de la XXIIe dynastie, régna brièvement aux côtés de son père Osorkon qui l'avait choisi comme successeur, mais mourut avant de prendre réellement le pouvoir".
Inhumé dans la nécropole royale de Tanis installée au cœur du temple d'Amon, son tombeau (NRT III) fut découvert par Pierre Montet et son équipe mi-mars 1939. Les plus hautes autorités en sont alors informées. Ainsi se souvient Georges Goyon "dès le lendemain, en présence du roi Farouk qui avait tenu à participer de ses propres mains à l'opération, nous soulevâmes ensemble le couvercle du sarcophage d’argent. C’est alors qu’apparut dans toute sa beauté, fixé par la magie du métal incorruptible, le masque d’or, l’image rayonnante, du pharaon Héqakheperré-Chéchanq… Outre le sarcophage d'argent, le trésor de Chéchonq se révélera être constitué de 20 kg de bijoux en or ! Pectorals, bracelets, bagues, … sont d'une incroyable beauté et d'une immense richesse…" Il précise en outre que le premier bijou "qui apparut à nos regards émerveillés fut un grand pectoral d'or pur, dont la forme rappelle un pylône classique de l'architecture égyptienne. Au centre, un gros scarabée de cœur déploie ses ailes…"
L'ensemble du trésor - dont ce pectoral - a été transporté, sous escorte militaire au Musée du Caire où il a été enregistré au Journal des Entrées JE 72170.
marie grillot
sources :
Pectoral en forme de Naos
http://www.globalegyptianmuseum.org/record.aspx?id=15532
Pierre Montet, Tanis - Douze années de fouilles dans une capitale oubliée du Delta égyptien, 1942
Montet Pierre, La nécropole royale de Tanis d'après les découvertes récentes. In: Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 89e année, N. 4, 1945. pp. 504-517
Montet Pierre, 1 Les constructions et le tombeau de Psousennes à Tanis (1951)
https://archive.org/stream/Montet1951/Montet%2C%20Pierre%20-%201%20Les%20constructions%20et%20le%20tombeau%20de%20Psousennes%20à%20Tanis%20%281951%29%20LR_djvu.txt
Parrot André
Pierre Montet, Les énigmes de Tanis, In: Syria. Tome 29 fascicule 3-4, 1952. pp. 361-362
https://www.persee.fr/doc/syria_0039-7946_1952_num_29_3_4794_t1_0361_0000_2
Guide du visiteur du musée de Boulaq (édition 1883), Gaston Maspero
Georges Goyon, La découverte des trésors de Tanis, Pygmalion, 1987
Tanis l'or des pharaons, catalogue de l'exposition Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 26 mars - 20 juillet 1987
Henri Stierlin, Christiane Ziegler, Tanis Trésors des pharaons, Seuil, 1987
Isabelle Franco, Dictionnaire de mythologie égyptienne, 2013
Pharaons - Catalogue de l'exposition présentée à l'Institut du monde arabe à Paris, du 15 octobre 2004 au 10 avril 2005
L'or des pharaons - 2500 ans d'orfèvrerie dans l'Egypte ancienne, Catalogue de l'exposition de l'été 2018 au Grimaldi Forum de Monaco, Christiane Ziegler
Damien Agut, Juan Carlos Moreno-Garcia, L'Égypte des pharaons - de Narmer, 3150 av. J.-C. à Dioclétien, 284 ap. J.-C., Belin, 2016
Pierre Tallet, Frédéric Payraudeau, Chloé Ragazzolli, Claire Somaglino, L'Egypte pharaonique, histoire, société, culture, Armand Colin, 2019
Zahi Hawass, catalogue de l'exposition Ramsès & l'or des pharaons, Laboratoriorosso, 2021
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