Lorsque, à la cinquantaine, le Général Oundebaounded a rejoint le "Bel Occident", son corps a été remis à la corporation des praticiens s’occupant des morts. Paraschistes et taricheutes ont procédé à l'embaumement, à la momification, long processus de soixante-dix jours… La momie a été parée de bijoux précieux, confectionnés dans des ateliers spécifiques, ou dont le choix respectait les volontés exprimées par le défunt…
"Outre le beau masque en or qui recouvrait le visage, les oreilles et le cou d'Oundebaounded, notons quelques larges pectoraux, plusieurs amulettes en or massif, de la longueur d'un doigt suspendues au cou à l'aide d'un gros fil rigide en or. Les effigies des dieux que ces petites pièces d'orfèvrerie sont censées représenter ont été ciselées dans la masse d'un lourd lingot d'or pur"…
Parmi les trois représentant une figure féminine léontocéphale, deux, bien que de taille légèrement différente (l'une est haute de 9,3 cm, l'autre de 7,2 cm), sont très ressemblantes.
"Le nom le plus connu et le plus général de cette divinité est Sekhmet, 'La Puissante', mais il faut se rappeler qu'un autre de ses noms célèbres était Bastet, aussi totalement léonine et redoutable que Sekhmet, et que celle-ci ne fut couramment représentée et vénérée sous l'aspect du chat domestique que trois siècles plus tard" précise Jean Yoyotte.
Bastet est représentée debout, ses pieds nus reposant sur un petit socle plat. Sa silhouette au modelé délicieux révèle une grâce toute féminine. Son corps, mince et élancé, est moulé dans une robe qui laisse deviner l'ensemble de sa morphologie : les seins bien sûr, mais également le nombril, le ventre, les genoux... Ses bras, plaqués le long du corps, sont ornés de bracelets de poignet et d'humérus matérialisés par des incisions, tout comme le collier à rangs multiples qui orne son cou. Ses poings serrés semblent lui conférer sa force...
Son visage léonin est très bien rendu. Il est surmonté du disque solaire "d'où jaillit, au niveau du front, le cobra uraeus signe de la puissance ignée de l'astre et du roi. Il s'agit d'une image classique de la puissance dangereuse du divin, appréhendée comme une entité féminine : l'Œil de Rê dont les colères déchaînent les calamités, mais qui, apaisée, devient une efficace protectrice" (Jean Yoyotte).
Dans "L'or des pharaons - 2500 ans d'orfèvrerie dans l'Egypte ancienne", Christiane Ziegler explique la conception de ces deux figurines : "L'arrière de la statuette est aplati de façon à ce qu'elle puisse aisément être suspendue sur la poitrine au moyen de l'anneau soudé au revers du disque solaire. L'ensemble est exécuté en or massif en utilisant la technique de la fonte à la cire perdue et les détails ont été repris au ciseau. Sous le socle (de la plus grande) une inscription ciselée donne l'identité de la déesse: 'Bastet, dame d'Ânkhtaouy (Memphis)'. La seconde effigie, de plus petite taille, est d'un travail identique mais avec beaucoup moins de détails et aucune inscription".
Cette divinité protectrice devait aider le défunt à gagner l'immortalité… Le tombeau inviolé du Général Oundebaounded (NRT III) a été découvert, à Tanis, par l'équipe de Pierre Montet qui œuvrait sur le site depuis 1929… "En 1946, l'équipe s'enrichit d'un nouvel arrivant : l'architecte Alexandre Lézine. En relevant les plans du tombeau de Psousennès, il considère que le bâtiment de calcaire doit receler encore une chambre. Pour avoir la confirmation de son hypothèse, Lézine dégage les joints des poutres du plafond à l'endroit qui lui semble propre à receler un espace. Il y introduit un mètre métallique qui ne rencontre que le vide… Cette chambre fut ouverte le 13 février 1946. Elle appartenait au chef des archers de Pharaon, Oundebaounded, qui était en même temps prophète de Khonsou à Thèbes et chef des prophètes de tous les dieux…" précise Henri Stierlin dans "Tanis, Trésors des pharaons".
Pour sa longue éternité, il eut le privilège de bénéficier d'un trésor funéraire conséquent… et, reconnaissance ultime, d'un tombeau jouxtant celui de Psousennès Ier qui l'avait élevé à ces hautes fonctions …
Ces deux amulettes en or de Bastet ont été enregistrées au Journal des Entrées du Musée du Caire JE 87717 et JE 87718.
marie grillot
sources :
Georges Goyon, La découverte des trésors de Tanis, Pygmalion, 1987
Pierre Montet, Vases sacrés et profanes du tombeau de Psousennès, Monuments et mémoires de la Fondation Eugène Piot, 1949, Volume 43
https://www.persee.fr/doc/piot_1148-6023_1949_num_43_1_1982
Tanis l'or des pharaons, catalogue de l'exposition Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 26 mars - 20 juillet 1987
Henri Stierlin, Christiane Ziegler, Tanis Trésors des pharaons, Seuil, 1987
Christiane Ziegler, Marie-Hélène Rutschowscaya, Guillemette Andreu, L'Egypte ancienne au Louvre, 1997
Christiane Ziegler, Marie-Hélène Rutschowscaya, Le Louvre, les antiquités égyptiennes, 2002
Jean-Pierre Corteggiani, L'Égypte ancienne et ses dieux, 2007
Isabelle Franco, Dictionnaire de mythologie égyptienne, 2013
Christiane Ziegler, L'or des pharaons - 2500 ans d'orfèvrerie dans l'Egypte ancienne, Catalogue de l'exposition de l'été 2018 au Grimaldi Forum de Monaco
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire