Cette statue en cèdre, haute de 57 cm, est composée de seize morceaux de bois attachés avec des chevilles. Elle représente un pharaon dans l'attitude de la marche, jambe gauche avancée, selon la "convention" de la statuaire masculine. L'impression de mouvement est accentuée par le fait qu'il tient fermement, dans sa main gauche, une crosse qui semble accompagner sa progression. Son bras droit repose le long du corps alors que son poing est vide de l'objet qu'il tenait, vraisemblablement un sceptre royal… Les mains et les doigts sont parfaitement sculptés et les ongles sont peints en blanc.
Le corps est d'un magnifique modelé, sublimé par les nuances que lui apportent les veines du bois. On déplore, du côté gauche, une grande fente verticale qui traverse le torse, de la base du cou à l'aine.
Les épaules sont larges, la taille mince, les jambes solides… Les pieds nus, aux orteils bien dessinés, reposent sur un socle rectangulaire.
Pharaon est vêtu d'un pagne, peint en jaune et ocre, qui laisse le nombril apparent. Court, près du corps et en partie plissé, il a souffert des affres du temps... "Les surfaces du pagne ont été recouvertes de stuc blanc avant l'application de la peinture. Des traces de couleur chair rosée, appliquées directement sur le bois de cèdre fin et foncé, apparaissent sur le corps" précise William C. Hayes dans "Scepter of Egypt I".
Le visage du souverain est à la fois rond et large, avec ses pommettes marquées. Les yeux sont très étirés et la ligne des sourcils épouse leur forme. Le nez a souffert, les lèvres sont épaisses avec des fossettes aux commissures. Le trou apparent sous le menton devait être le point d'accroche de la barbe postiche.
Autre attribut du pouvoir, Pharaon porte la coiffe de la Basse-Egypte (desheret). "La couronne rouge se présente comme une sorte de mortier dont la partie postérieure remonte à la verticale et dans lequel est fichée une tige terminée en spirale (la khabet)" précise Isabelle Franco dans son dictionnaire. "La couronne est plâtrée et peinte d'ocre rouge" (Metropolitan Museum of Art de New York), mais elle a souffert et accuse de nombreuses lacunes.
Cette statue a beaucoup de charme, par la qualité de sa réalisation, par sa "plastique" et également par les contrastes qu'apportent le jaune du pagne et le rouge de la couronne.
Le site fut fouillé, sommairement, dès 1882 par Gaston Maspero, puis plus longuement, en 1894 et 1895, par Etienne Paul Joseph Gautier et Gustave Jéquier de l'IFAO. Il fut ensuite "investi" par le Metropolitan Museum. Pendant neuf saisons - entre 1907 et 1934 -, les fouilles y seront dirigées par le conservateur du musée, Albert Morton Lythgoe, ainsi que par Ambrose Lansing et Arthur Mace.
Entre mars et mai 1914, A.M. Lythgoe "redécouvrit" le grand complexe funéraire du chancelier Imhotep qui n'avait été que partiellement fouillé en 1894 par Gautier. Les investigations entreprises au sud du mur d'enceinte conduisirent à la découverte d'un dépôt contenant deux statues presque identiques, à la différence qu'elles portaient, l'une la couronne rouge de Basse-Egypte (desheret) et l'autre, la couronne blanche de Haute-Egypte (hedjet). Orientées : "face à l’est, elles se tenaient côte à côte derrière un petit naos en bois".
Le Metropolitan fournit l'explication suivante : "Une chambre avait été aménagée dans la partie sud du mur d'enceinte et les statuettes ainsi que le sanctuaire y étaient cachés, sans doute après avoir joué un rôle dans une cérémonie funéraire".
Lors du partage des fouilles, les statues qui reposaient ensemble depuis plus de 3800 ans furent séparées. Celle à la couronne blanche symbolisant la Haute-Egypte a rejoint le musée du Caire où elle a été enregistrée au Journal des Entrées sous la référence JE 44951.
Quant à la seconde, portant la couronne rouge symbolisant la Basse-Egypte, elle est partie vers le Metropolitan Museum of Art de New York où elle est exposée sous le n° d'entrée 14.3-17.
Ces deux statues étaient anépigraphes : elles ont été attribuées à Sesostris Ier parce qu'elles ont été trouvées près de sa pyramide, mais il arrive qu'elles soient attribuées à un autre pharaon, comme Amenemhat II ou encore Sesostris II.
Il est à noter que, si clairement le Musée du Caire attribue "sa" statue à Sésostris Ier, le Metropolitan, lui, attribue à la sienne le nom de "Guardian Figure".
marie grillot
sources :
The Metropolitan Museum of Art New York
https://www.metmuseum.org/art/collection/search/543864
https://books.google.fr/books?id=a08kkuWhv7wC&printsec=frontcover&redir_esc=y&hl=fr#v=onepage&q=bahari&f=false
Hayes, William C. 1953. Scepter of Egypt I: A Background for the Study of the Egyptian Antiquities in The Metropolitan Museum of Art: From the Earliest Times to the End of the Middle Kingdom. Cambridge, Mass.: The Metropolitan Museum of Art, p. 192, fig. 117.
https://www.metmuseum.org/art/metpublications/The_Scepter_of_Egypt_Vol_1_From_the_Earliest_Times_to_the_End_of_the_Middle_Kingdom?fbclid=IwAR3C3MQZlsj_PIWEfnEqB5MwfBDjZcJhMEwOr8s9ijRwtXrOZWepwlAY-5M
Lilyquist, Christine, Peter F. Dorman, and Edna R. Russmann 1983. The Metropolitan Museum of Art Bulletin, vol. 41, no. 3 (Winter)
https://www.metmuseum.org/art/metpublications/Egyptian_Art_The_Metropolitan_Museum_of_Art_Bulletin_v_41_no_3_Winter_1983_1984?Tag=&title=&author=&pt=%7B05598FA1-8F02-4579-A088-9F7BC7165316%7D&tc=&dept=
Aldred, Cyril 1970. "Some Royal Portraits of the Middle Kingdom in Ancient Egypt." In Metropolitan Museum Journal, 3
https://www.metmuseum.org/art/metpublications/Royal_Portraits_of_the_Middle_Kingdom_in_Ancient_Egypt_The_Metropolitan_Museum_Journal_v_3_1970
Vandier, Jacques 1958. Manuel d'archéologie égyptienne: Les grandes époques: La statuaire, 3. Paris, 174, 215, 358; pl. 59.
el-Licht : Capitale et Résidence royale de l'Égypte ancienne" (IFAO)
https://www.ifao.egnet.net/recherche/activites-passees/axes2012/espaces-pouvoir/2012-lisht/
Musée Égyptien du Caire
http://www.globalegyptianmuseum.org/record.aspx?id=14858
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