Dans son ouvrage "Toutankhamon, vie, mort et découverte d'un pharaon", Nicholas Reeves fait le constat que : "Toutankhamon fut inhumé avec beaucoup plus de bijoux et d’amulettes que Carter n'en découvrit sur la momie, et à en juger par des inscriptions antiques cataloguant le contenu des coffrets à bijoux, les pilleurs de la tombe firent main basse sur de nombreuses pièces parmi les plus précieuses. D'après une estimation de Carter, soixante pour cent au moins des plus beaux bijoux 'non attachés' avaient disparu"…
Cette réalité peut, bien évidemment, faire naître des regrets… Mais les deux cents bijoux qui nous sont parvenus nous comblent par la qualité de leur facture, leur originalité, leur splendeur, leur richesse et par "l'éternelle" symbolique qu'ils magnifient.
Parmi les nombreux bracelets, celui-ci a été retrouvé dans la "salle du trésor" qui fut ouverte officiellement le 17 février 1923, soit presque trois mois après la découverte de la tombe par Lord Carnarvon et Howard Carter.
Salle du trésor de la tombe de Toutankhamon (KV 62) découverte en novembre 1922 par Lord Carnarvon et Howard Carter The Griffith Institute - Tutankhamun: Anatomy of an Excavation - The Howard Carter Archives - Photographs by Harry Burton |
Il était déposé dans un coffret en bois sombre, en forme de cartouche, dont le couvercle reproduit le nom de Toutankhamon en un délicat rébus coloré. Sur les photos d'Harry Burton, on peut l'identifier, posé à terre, devant et à gauche du naos en bois doré protégé par les quatre déesses.
Dans "Jewels of the Pharaohs", Cyril Aldred décrit ainsi l'élément principal, d'une longueur de 4,50 cm et d'une largeur de 4,10 cm : "La pièce centrale est formée d'un scarabée en améthyste portant le nom du roi serti dans une plaque d'or ovale ouverte ornée de granules d'or. Il est flanqué d'uraeï solaires incrustés, et bordé d'anneaux de perles de pierre et d'or. Le dessous est inscrit sur la bordure entourant la base du scarabée avec les titres et nom du roi 'vivant à jamais'".
Une grande partie de son charme réside dans la couleur de l'améthyste dans lequel est sculpté le scarabée : un violet tendant vers le rose, d'une tonalité tendre et presque translucide. "L'améthyste est une variété de quartz transparente de couleur violet foncé à rose clair. Ce minéral était dans l'Égypte pharaonique extrait du Ouadi el-Houdi, au sud-est d'Assouan. Il est désigné sous le terme hsmn/hésémen. Il est utilisé pour la fabrication de petits objets, essentiellement bijoux (perles) et amulettes" précise Christiane Ziegler dans "L'or des pharaons".
Le coléoptère, très finement travaillé, révèle une grande maîtrise dans son exécution. Symbole du renouveau, de la renaissance, le scarabée est une représentation que l'on trouve très souvent dans la joaillerie égyptienne. Comme nous le rappelle Gaston Maspero : "Le scarabée, pris comme emblème divin, représentait Khopri, le soleil levant, le soleil qui se produit (khoprou) au matin de chaque jour, et qui renaît après être mort le soir du jour précédent." Il précise aussi que "la racine de khoprou est 'devenir' : aussi est-il devenu de bonne heure en Egypte l'emblème de la vie humaine et des devenirs successifs de l'âme dans l'autre monde".
Le tour de poignet, de 13,50 cm de long et d'1,90 cm de large, est ainsi décrit par Cyril Aldred : "Le bracelet est composé de quatre chaînes de perles enfilées entre huit entretoises en or. Les perles se présentent sous la forme de scarabées, d'œil-oudjat et de sphéroïdes. Les scarabées d'or ajourés sont inscrits avec au nom du roi".
Alfred Lucas a précisé que ces éléments étaient en or, lapis-lazuli, turquoise, cornaline, jaspe rouge et a-t-il indiqué : "une perle en verre (rouge) a été ajoutée".
Il offre ainsi une ravissante série de huit séquences, rythmées et colorées. Il ne faut pas occulter que les anciens Égyptiens prêtaient, à la nature même des pierres des pouvoirs protecteurs, et leur couleur était, elle aussi chargée de sens… Le défunt devait bénéficier de tout l'éventail possible de protections pour pouvoir renaître…
Ce bracelet a été enregistré au Journal des Entrées du Musée du Caire sous la référence JE 62380 ; il bénéficie depuis peu d'un référencement lié à sa future "demeure", le Grand Egyptian Museum : GEM 490.
Il y a lieu de signaler qu'il était présent à la grande exposition "King Tut : Treasures of the Golden Pharaoh" qui, après avoir débuté en mars 2018 à Los Angeles, s'était poursuivie à Paris avant de rejoindre Londres. Cependant, la crise sanitaire engendrée par le coronavirus a mis fin, prématurément, à ce long périple mondial qui devait se poursuivre à Washington, Sydney, Séoul, Philadelphie, Chicago, Tokyo et Osaka ... Fin août 2020, l'ensemble des artefacts avait, prématurément, rejoint l'Egypte …
marie grillot
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