Hathor est l'une des déesses "primordiales" du panthéon égyptien. Elle est certainement aussi l'une de celles parées des plus beaux "qualificatifs" : Maîtresse du Ciel, Souveraine de tous les dieux, Dame de l'amour, de la joie, de la musique, … "La Dorée" a été adorée dans de multiples lieux de culte… Ses représentations, sous sa forme de vache ou sa forme "féminine", sont également fort nombreuses. Sa belle face orne les chapiteaux des colonnes, les sistres, les miroirs, les contrepoids de ses colliers menat …
Sur ce pendentif, elle apparaît sous son aspect féminin, avec des oreilles de vache.
Son visage, d'une grande beauté, est parfaitement symétrique. Il est de forme presque triangulaire, large au niveau des joues, puis part en s'amincissant vers un menton doucement arrondi. Ses yeux immenses, dont l'iris sombre se détache du blanc de l'œil, sont pleins de vie. Ils sont délicatement cernés d'or, tout comme la ligne de fard qui les prolonge. Les sourcils, d'or également, épousent parfaitement la forme des yeux, s'étirant, de manière identique en une belle harmonie.
Le nez, aux narines marquées, est de proportions idéales. Quant à la bouche aux lèvres ourlées, elle est plutôt petite.
Son visage est entouré d'une magnifique perruque droite, à séparation médiane, dont les mèches sont matérialisées par de fines stries régulières. Elle lui couvre une bonne partie du front, puis part en deux masses épaisses, qui sont rejetées derrière les oreilles puis reviennent encadrer les joues
Le grand charme de cette coiffure réside dans les bandes d'or que le maître orfèvre a eu le bonheur d'ajouter en sept endroits. Fines, très légèrement bombées, elles symbolisent les rubans devant "discipliner" la chevelure. Elles sont placées de façon aussi harmonieuse qu'équilibrée. L'une se trouve au centre du front, et les six autres se déclinent de part et d'autre, au niveau de la pointe des sourcils, puis de la partie inférieure des joues (à noter que celle du côté gauche est manquante), puis, enfin, au bas de la coiffure.
"Une toque plate en forme de 'corniche à gorge' complète sa coiffure, donnant un aspect architectural à ce petit bijou : de tels chapiteaux ornaient les temples de la déesse" indique Christiane Ziegler dans "L'or des pharaons - 2500 ans d'orfèvrerie dans l'Egypte ancienne".
Cette ravissante représentation d'Hathor, d'une hauteur de 5,5 cm et d'une largeur de 5,3 cm, est sculptée dans du lapis-lazuli, une pierre que l'on ne trouvait pas en Egypte mais qui y a cependant été utilisée depuis les temps anciens. "Les Égyptiens faisaient venir d'Afghanistan le lapis-lazuli, dont le bleu profond pailleté de métal évoquait le ciel nocturne étoilé mais aussi l'obscurité des eaux primordiales."
Dans "Ancient Egyptian Materials and Technology", Paul T. Nicholson et Ian Shaw, indiquent avec plus de précisions sa provenance : "La région de Badaskhshan au nord est de l'Afghanistan où quatre carrières ont été identifiées". Ils ajoutent également que : "Le lapis-lazuli était fréquemment utilisé dans les bijoux jusqu'à la Troisième Période intermédiaire, comme on le voit dans les bijoux retrouvés dans la tombe de Toutankhamon (KV 62) et dans les tombes des souverains enterrés à Tanis. Mais par la suite, il est devenu moins présent dans leur réalisation".
Ce pendentif a été trouvé par l'égyptologue Ahmed Badawi, au printemps 1942, en plein cœur de la Seconde Guerre mondiale alors qu'il fouillait à Mit Rahineh. Le site du temple de Ptah de l'ancienne Memphis révélera la présence de nombreuses sépultures de grands prêtres. "La tombe du prince héréditaire Scheschonk appartenait à un complexe de chambres funéraires de la XXIIe dynastie, proches les unes des autres ".
La triade d'Osorkon II - or, lapis-lazuli et verre rouge - 874 - 850 av. J.-C. (XXIIe dynastie) Département des Antiquités égyptiennes du Musée du Louvre - E 6204 |
Il était le fils de Karomama "fille royale" et d'Osorkon II, 5e pharaon de la XXIIe dynastie, dont la tombe a été découverte, le 25 février 1939 à Tanis, par Pierre Montet et son équipe.
Il semble que ce prince soit "décédé du vivant de son père". Il était entouré d'un beau trousseau funéraire composé notamment de vases d'albâtre, de 200 ouchebtis en faïence bleue avec des inscriptions, de nombreux bijoux en or, pendentifs, bracelets, bagues de pieds, boucles d'oreille, de statuettes d'Isis, d'Osiris, de Thouéris, d'Anubis, de piliers Djed, etc …
Christiane Ziegler précise que : "Le prince Chéchonq D, fils du pharaon Osorkon II et grand prêtre de Ptah, emporta ce pendentif suspendu autour du cou par un ruban d'or dans son tombeau de Memphis".
Ce bijou a été enregistré au Journal des Entrées du Musée du Caire sous la référence JE 86780. Quant à la chambre funéraire du prince Chéchonq - JE 88131 -, elle était, jusqu'aux récents travaux, exposée dans le jardin du Musée, à l'est du bâtiment principal.
marie grillot
sources :
Ahmed Badawy, Das Grab des Kronprinzen Scheschonk, Sohnes Osorkon's II, und Hohenpriesters von Memphis, ASAE 54, 1956, p 153-177
https://archive.org/details/ASAE-54.1-1956
Bertha Porter, Rosalind L. B. Moss,Topographical Bibliography of Ancient Egyptian Hieroglyphic Texts, Reliefs, and Paintings - Ill: MEMPHIS Part 2. Saqqara to Dahshur, Second edition revised and augmented by Jaromir Malek, Griffith Institute Ashmolean Museum Oxford, 1981
http://www.griffith.ox.ac.uk/topbib/pdf/pm3-2.pdf
Georges Goyon, La découverte des trésors de Tanis, Pygmalion, 1987
Jean Yoyotte, Tanis l'or des pharaons, catalogue de l'exposition Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 26 mars - 20 juillet 1987, Association Française d'Action Artistique, 1987
Francesco Tiradritti, Trésors d'Egypte, Les merveilles du musée égyptien du Caire, Gründ, 1999
Jean-Pierre Corteggiani, L'Egypte ancienne et ses dieux - Dictionnaire illustré, Fayard 2007
Isabelle Franco, Dictionnaire de mythologie égyptienne, Tallandier, 2013
Christiane Ziegler, L'or des pharaons - 2500 ans d'orfèvrerie dans l'Egypte ancienne, Catalogue de l'exposition de l'été 2018 au Grimaldi Forum de Monaco, Hazan 2018
Paul T. Nicholson, Ian Shaw, Ancient Egyptian Materials and Technology, Cambridge University Press, 2000
https://books.google.fr/books?id=Vj7A9jJrZP0C&pg=PA57&lpg=PA57&dq=serpentine+karlshausen&source=bl&ots=zu43rhvGLv&sig=ACfU3U12ojtGokhGEQawyj911OJwTdDDrw&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwjmv6jqjIHpAhVEqxoKHUieATkQ6AEwAHoECAoQAQ#v=snippet&q=lapis&f=false
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