En 1900-1901, l'égyptologue anglais William Matthew Flinders Petrie mène, pour le compte de l'Egypt Exploration Fund, une mission dans la nécropole de Oumm el-Gaab à Abydos.
Il fouille notamment la tombe de Djer qui avait été découverte fin 1897 début 1898, par le français Emile Amélineau, qui l'avait alors assimilée au "tombeau d’Osiris".
La sépulture de ce pharaon de la Ière dynastie avait été largement pillée à l'Ancien Empire mais les ouvriers de Petrie feront toutefois une incroyable découverte…
Dans "The royal tombs of the first dynasty" l'égyptologue la relate ainsi : "La plus importante découverte de cette année est celle des bijoux de la tombe du roi Zer, qui appartenaient à sa reine. Alors que mes ouvriers nettoyaient le tombeau ils ont remarqué parmi les débris qu'ils remuaient un morceau de bras dans ses bandelettes. Il gisait dans un trou dans le mur nord de la tombe. Les quatre personnes qui l'ont trouvé ont regardé dans les bandelettes et ont vu une grosse perle d'or et la rosace du deuxième bracelet. Ils n'ont pas cédé au désir naturel de chercher plus loin ou de les enlever ; ils ont reposé le bras là où ils l'avaient trouvé".
Dans son "Guide du visiteur au Musée du Caire, 1902", Gaston Maspero, précise la technique employée ensuite pour récupérer les bijoux : "Ils étaient tous les quatre encore en place au haut d'un bras de momie féminine qui gisait dans un coin du tombeau du Pharaon Zarou, dans la nécropole d'Omm-el-Gaab ; les fils qui les maintenaient étant pourris, M. Petrie les passa sur un fil nouveau, tandis qu'ils adhéraient à la peau du bras, et il réussit à leur conserver leur agencement exact".
C'est ainsi que nous est parvenu ce remarquable - et unique - ensemble de bijoux créés il y a 5000 ans, plus précisément à l'Epoque Thinite, sous le règne de l'Horus-Djer, généralement daté de 2964-2912 av. J.-C..
Le bracelet qui se trouve en première place sur cette photo est généralement appelé "Bracelet au sérekh du roi Djer". Référencé JE 35054b - CG 52008, il est en or et turquoise et mesure 15 cm de long. Dans "L'or des pharaons", Christiane Ziegler nous en livre une merveilleuse description : "C'est un bijou véritablement royal. Il est composé de vingt-sept perles plates, alternativement en or et en turquoise, dont la taille décroît vers les extrémités. Elles sont décorées sur les deux faces et figurent un sérekh, porte monumentale et plan de palais, surmonté par le faucon Horus protecteur de la royauté ; sur les éléments d'or, les rapaces se redressent ; sur ceux de turquoise, ils apparaissent couchés. Les faucons sont tous tournés vers la droite. C'est à l'intérieur de ce cadre que par la suite sera inscrit le 'nom d'Horus', l'un des noms des rois d'Égypte - qui pouvaient en posséder jusqu'à cinq - mais ici il ne contient qu'un décor architectural. Sa partie supérieure est décorée de points disposés sur plusieurs rangs. Ces points sont rectangulaires sur l'or et ronds sur la turquoise. Chaque perle est percée longitudinalement de deux trous permettant le passage de fils qui viennent se rejoindre dans des fermoirs d'or de forme triangulaire. Les sérekh d'or sont composés en deux parties avec des détails gravés alors que les faucons sont moulés. Les plaquettes en turquoise sont taillées et soigneusement polies".
Le deuxième bracelet est fait de trois rangées de perles d'or, de lapis-lazuli et de turquoise. Référencé JE 35054c - CG 52009, il mesure 10,2 cm. Mohamed Saleh et Hourig Sourouzian le décrivent ainsi dans leur "Catalogue officiel du Musée Egyptien du Caire" : "Le bracelet comporte des perles allongées faites de fil d'or enroulé, et des perles de même forme, taillées dans le lapis-lazuli. Entre ces deux sortes s'intercalent des boules de turquoise, de lapis et d'or, de tailles différentes. La fermeture est assurée par deux anneaux et une boule d'or".
Dans son "Catalogue général des antiquités égyptiennes du Musée du Caire", Emile Vernier précise : "Les perles sont enfilées sur trois rangs, mais ces rangs ne sont pas parallèles et le bracelet est resserré en deux endroits où les fils passent dans trois perles rondes rangées une à une. Le bracelet est donc formé de trois groupes de perles dont les dimensions décroissent du milieu du groupe à la rencontre des perles uniques".
Le troisième bracelet, référencé JE 35054 (a ou d?) - CG 52010, conjugue des perles d'or, d'améthyste, et de turquoise, de formes diverses ; il est long de 15 cm.
Silvia Einaudi ("Les merveilles du musée égyptien du Caire"), le décrit ainsi : "Il comporte douze perles en forme de clepsydre disposées verticalement en quatre groupes de trois, séparés par deux losanges en turquoise. Chaque groupe possède une améthyste centrale remplacée dans un des groupes par une perle en pâte de verre marron cantonnée de deux perles d'or. Les perles ne sont pas percées, mais reliées par un fil enroulé autour d'une rainure centrale et maintenu par un anneau d'or fin. Séparés des perles à clepsydre en or par des sphères en turquoise, les losanges en turquoise sont recouverts d'une feuille d'or à leurs extrémités et percés afin de permettre le passage du fil".
Silvia Einaudi ("Les merveilles du musée égyptien du Caire"), le décrit ainsi : "Il comporte douze perles en forme de clepsydre disposées verticalement en quatre groupes de trois, séparés par deux losanges en turquoise. Chaque groupe possède une améthyste centrale remplacée dans un des groupes par une perle en pâte de verre marron cantonnée de deux perles d'or. Les perles ne sont pas percées, mais reliées par un fil enroulé autour d'une rainure centrale et maintenu par un anneau d'or fin. Séparés des perles à clepsydre en or par des sphères en turquoise, les losanges en turquoise sont recouverts d'une feuille d'or à leurs extrémités et percés afin de permettre le passage du fil".
Quant au dernier bracelet, fait d'or, de lapis-lazuli et de turquoise, il est référencé JE 35054 (a ou d?) - CG 52011. Il est désormais en deux parties, l'une de 3,7 cm et l'autre de 2,2 cm.
Dans "Jewels of the Pharaohs", Cyril Aldred l'analyse ainsi : "Les deux parties, lorsqu'elles furent retrouvées, étaient reliées par des mèches de cheveux (peut-être des queues de girafe) et des fils d'or d'épaisseur égale tressés ensemble. La première moitié a pour élément central une rosace creuse en or, réalisée avec une grande habileté imitant une fleur entrouverte. Elle est percée de trous au travers desquels passent trois fils portant des perles turquoises, de forme irrégulière mais très polies, alternant avec des billes d'or et des bagues soudées par trois pour former des entretoises. Les deux cordes sont reprises à chaque extrémité dans une seule boule de lapis-lazuli et une boule creuse en or. La moitié arrière inverse l'ordre aux extrémités de sorte qu'un lapis-lazuli suit une perle d'or. La fixation se faisait au moyen d'une boucle et d'un bouton boule d'or qui, cependant, ne sont pas représentés sur la plaque".
Ces bijoux nous ravissent par leur fraîcheur, par leur originalité, par l'excellence de leur facture… Nous ne pouvons que partager l'admiration de William Matthew Flinders Petrie : "Ici, au point de cristallisation de l'art égyptien, nous voyons la variété sans limites et la richesse du dessin... il n'y a pas une seule perle de chaque bracelet qui soit interchangeable avec celle d'un autre bracelet. Chacune est d'un dessin indépendant, nouveau et exempt de toute convention ou copie".
Ces quatre bracelets sont exposés au Musée Égyptien du Caire où ils ont été déposés après leur découverte.
marie grillot
sources :
William M. Flinders Petrie, The royal tombs of the first dynasty 1901 (Part II), London, 1901
https://archive.org/details/cu31924020551267
https://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/petrie1901bd2/0026/text_ocr
Gaston Maspero, Guide du visiteur au Musée du Caire, IFAO, Le Caire, 1902
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57248808.r=gaston+maspero.langFR
Émile Vernier, Catalogue du musée du Caire - Bijoux et orfèvreries - Fascicule 2, Ifao le Caire, édition 1907-1927
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k58019893/f21.item.r=52009.langFR.texteImage
Bertha Porter and Rosalind L. B. Moss, Topographical Bibliography of Ancient Egyptian Hieroglyphic Texts, Reliefs, and Paintings - V. Upper Egypt : Sites (Deir Rifa To Aswan, Excluding Thebes And The Temples Of Abydos, Dendera, Esna, Edfu, Kom Ombo And Philae), B.Sc. Oxon., Griffith Institute Ashmolean Museum, Oxford First Published 1937, The Oxford University Press Re-Issued by The Griffith Institute 1962
http://www.griffith.ox.ac.uk/topbib/pdf/pm5.pdf
Jean-Pierre Corteggiani, L'Egypte des pharaons au musée du Caire, Hachette Paris, 1986
Mohamed Saleh, Hourig Sourouzian, Catalogue officiel du Musée Egyptien du Caire, Verlag Philippe von Zabern, 1997
Francesco Tiradritti, Trésors d'Egypte, Les merveilles du musée égyptien du Caire, Gründ, 1999
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