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| Statuette de l'architecte Khâ - bois - XVIIIe dynastie - provenant de sa tombe (TT 8) à Deir el-Medineh découverte le 15 février 1906 par la Mission Archéologique italienne dirigée par Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini - Musée Égyptien de Turin - S. 8335 |
Haute de 43 cm, la statuette de Khâ (chef de la nécropole royale sous la XVIIIe dynastie) est sculptée dans un bois dense que le sculpteur a poli, longuement, inlassablement, jusqu'à lui conférer un touché impeccablement lisse. Et c'est certainement le temps, la patine des ans, qui en a "adouci" la couleur jusqu'à lui donner cette teinte 'caramel' si chaleureuse au regard… Que ce soit par la qualité de sa facture, son aspect esthétique, l'émotion et la douceur qu'elle dégage, cette statue est, sous tous les aspects, un modèle de perfection. Ce sentiment est très justement traduit par Ernest Scamuzzi dans "L’art égyptien au Musée de Turin" : "Oeuvre exquise d'un artiste extrêmement sensible, cette statuette intacte, avec son modelé riche de vibrations et de nuances, perpétue Khâ dans la pleine vigueur de ses meilleures années".  |
| Statuette de l'architecte Khâ - bois - XVIIIe dynastie - provenant de sa tombe (TT 8) à Deir el-Medineh découverte le 15 février 1906 par la Mission Archéologique italienne dirigée par Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini - Musée Égyptien de Turin - S. 8335 |
Khâ est debout, dans l'attitude conventionnelle de la marche, jambe gauche avancée et ses bras sont tendus le long du corps. Mince et juvénile, il est représenté avant que les années ne portent atteinte à sa silhouette. Le visage aux joues pleines, parfaitement symétrique, est très expressif, avenant tout en étant sérieux. Les yeux sont grands et la bouche, aux lèvres généreuses, est close. La perruque noire, frisée, fruit d'un travail patient et délicat du sculpteur, s'épanouit jusqu'aux épaules.
Khâ porte un pagne que l'on imagine en lin : il lui enserre la taille et descend au-dessous du genou. Centrée sur le devant se décline verticalement une colonne de hiéroglyphes dorés, une prière sincère, empreinte d'espérance pour que : "tout ce qui parvient sur la table d’offrandes d’Amon, roi des dieux, soit pour le ka du Chef de la Grande Place, Khâ, juste de voix".
Le ka demeure, pour nous, une notion complexe. Voici un court extrait de la définition qu'en donne Isabelle Franco : "Le ka représente le double immatériel de l'être… Il grandit et prospère en même temps que l'être. En rapport étroit avec les nourritures, c'est lui qui profite des offrandes après la mort."
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Statuette de l'architecte Khâ - bois - XVIIIe dynastie - provenant de sa tombe (TT 8) à Deir el-Medineh découverte le 15 février 1906 par la Mission Archéologique italienne dirigée par Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini - Musée Égyptien de Turin - S. 8335
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Le charme de cette statue se teinte d'une infinie tendresse à la vue de la délicate couronne de fleurs - séchées désormais - qui orne si joliment ses épaules. Même s'il n'en subsiste que le lien de tressage, même si ces fleurs ont perdu depuis des siècles leur beauté et leur odeur, elles signifient bien plus. Elles sont parmi les derniers témoignages d'affection ou de vénération dont a bénéficié le défunt avant que sa tombe ne soit refermée. Une seconde couronne a été déposée, à ses pieds, sur le socle de la statue…
Si Khâ "est censé avoir été à l'origine un homme d'origine modeste", il semble que c'est grâce à son mérite et à ses capacités qu'il a pu "s'élever" jusqu'à atteindre les plus hautes fonctions au sein de la communauté des artisans de "Set Maât her imenty Ouaset" ("La place de Vérité, à l'occident de Thèbes" l'actuel village de Deir el Medineh).
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Village des artisans de Deir el-Medineh - Rive ouest de Louqsor
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Fondé au début de la XVIIIᵉ dynastie sous le règne de Thoutmosis Iᵉʳ, ce village - qui sera étendu et agrandi plusieurs fois, notamment sous les règnes de Thoutmosis III et des premiers ramessides - était "une institution royale".
Les membres de la communauté (architectes, scribes, peintres, sculpteurs, carriers, simples ouvriers…) qui travaillaient au creusement et à la décoration des demeures d'éternité de la Vallée des Rois et de la Vallée des Reines, et peut-être même de nécropoles plus lointaines, y vivaient, avec leur famille, protégés par des murs d'enceinte.
Khâ, dont la vie peut se situer entre 1400 à 1350 av. J.-C., eut l'honneur d'œuvrer sous le règne de trois pharaons : Amenhotep II (1424-1398 av. J.-C.), Thoutmosis IV (1398-1388 av. J.-C.) et Amenhotep III (1388-1348 av. J.-C.).
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Statuette de l'architecte Khâ - bois - XVIIIe dynastie - provenant de sa tombe (TT 8) à Deir el-Medineh découverte le 15 février 1906 par la Mission Archéologique italienne dirigée par Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini - Musée Égyptien de Turin - S. 8335 - photo du musée |
Devenu un personnage important, et très certainement influant, Khâ était paré des titres suivants : " 'hery Set-Aa', 'Chef de la Grande Place' (la nécropole royale), 'imy-ra kat em Set-Aa', 'Surintendant aux travaux de la Grande Place', 'imy-ra kat Per-Aa', 'Surintendant aux travaux de la Grande Maison' (le palais) et 'Sesh nisout', 'Scribe royal' "…
On ne peut douter que Khâ consacra beaucoup de temps à préparer sa demeure d'éternité… Comme l'exprime Eleni Vassilika dans "Trésors d'Art du museo Egizio" : "Une tombe d'une telle magnificence doit avoir nécessité des années de préparation, un processus que Khâ a certainement supervisé en personne alors qu'il était encore en vie".
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| Le 15 février 1906, Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini découvrent, à Deir el-Medineh la tombe inviolée de l'architecte Khâ et de son épouse Mérit (TT 8) on distingue la statuette de Khâ déposée sur le fauteuil (photo exposée au Musée Égyptien de Turin) |
La tombe inviolée de Khâ et de sa chère épouse Mérit sera découverte, le 15 février 1906, dans le cirque nord de la nécropole de Deir el-Médineh, par Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini de la mission archéologique italienne du Musée de Turin, en présence d'Arthur Edward Pearse Brome Weigall, inspecteur chef des antiquités, responsable de la protection et de la gestion des antiquités de Haute-Égypte.
Elle s'avèrera receler d'incroyables richesses et constitue, très certainement, l'une des plus belles découvertes égyptologiques de ce tout début du XXe siècle !
Mobilier, statues, aliments, vaisselle, linge de maison, instruments et outils de travail de Khâ, coffrets de toilette et boîte à ouvrage de Mérit, … Ce sont plus de 500 objets qui constituent autant de témoignages hautement instructifs de la vie d'un couple qui avait particulièrement bien réussi dans ce ‘microcosme' qu'était alors la communauté des artisans.
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| Le 15 février 1906, Ernesto Schiaparelli et Francesco Ballerini découvrent, à Deir el-Medineh la tombe inviolée de l'architecte Khâ et de son épouse Mérit (TT 8) on distingue la statuette de Khâ déposée sur le fauteuil (photo exposée au Musée Égyptien de Turin) |
C'est, comme l'explique Enrico Ferraris dans le "Catalogue du Museo Egizio" : "Au centre de la chambre funéraire, face aux tables chargées d'offrandes alimentaires et au milieu des nombreux tabourets déposés dans la tombe que Schiaparelli trouve une chaise à dossier ornée d'illustrations florales et d'inscriptions visant garantir à l’âme du défunt 'toute chose bonne et pure' par intercession d'Osiris et garnie de différents objets : appuyé contre le dossier, un des deux oushebti de Khâ (statuettes momiformes destinées à le substituer dans les corvées des champs de l'au-delà) ; au centre, une statuette en bois à l'effigie du défunt, parée d'une guirlande autour des épaules et d'une autre aux pieds."
La momie de Khâ, qui reposait à l'abri de trois cercueils, est parvenue dans un parfait état de conservation, de même que celle de son épouse Mérit. "Les examens radiographiques et les scanners effectués ont non seulement révélé que les deux corps n'avaient pas été éviscérés, mais aussi que de magnifiques bijoux, dont les matériaux n'ont pas encore été identifiés, étaient secrètement enfouis dans les bandages... Khâ est paré d'un collier particulier appelé 'shebyou', formé de nombreux disques au centre desquels passe un petit cordon, que le roi avait coutume d'offrir à ses fonctionnaires les plus méritants en guise d’ 'or de la récompense'. Il porte, en outre, une petite chaîne à laquelle pend un 'scarabée de cœur', une paire de larges boucles d’oreilles, quatre bracelets dont deux de cheville, cinq anneaux et deux amulettes en forme de 'noeud d’Isis' et de cobra, placés respectivement sur la poitrine et la tête" (Enrico Ferraris).
Khâ a rejoint le royaume d'Osiris depuis plus de 3400 ans, mais, par cette statuette exposée au Musée Egyptien de Turin sous le n° d'inventaire S. 8335, il demeure pour nous éternellement jeune et son nom continue à être prononcé …
marie grillot
sources :
Statuetta di Kha
https://collezioni.museoegizio.it/it-IT/material/S_8335/?description=KHA&inventoryNumber=&title=&cgt=&yearFrom=&yearTo=&materials=&provenance=&acquisition=&epoch=&dynasty=&pharaoh=
Ernest Scamuzzi, L’art égyptien au Musée de Turin, Hachette, 1966
Le musée égyptien Turin, Federico Garolla Editore, 1988
Isabelle Franco, Dictionnaire de mythologie égyptienne, Pygmalion 1999
Les artistes de pharaon, Deir el Medineh et la Vallée des Rois, Louvre, 2002
Eleni Vassilika, Trésors d'Art du museo Egizio, Allemandi & Co, 2006
Guide museo Egizio, éditions Franco Cosimo Panini, 2015
Museo Egizio, Fondazione Museo delle Antichità Egizie di Torino, Franco Cosimo Panini Editore, 2016
Morris L. Bierbrier, Who Was Who in Egyptology, London, Egypt Exploration Society, 2012
Ève Gran-Aymarich, Les chercheurs du passé 1798-1945 : Aux sources de l’archéologie, CNRS Éditions via OpenEdition, 2016
https://books.google.fr/books?id=wIKlDAAAQBAJ&pg=PA1155&lpg=PA1155&dq=schiaparelli+maspero&source=bl&ots=eiKoGLOzaj&sig=Q12Ot2EYTNn209S0gdRSiKjjG58&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwi8ivmMjdbRAhWBQBQKHbB2DJoQ6AEIMzAI#v=onepage&q=schiaparelli%20maspero&f=false
Bertha Porter, Rosalind L. B. Moss,Topographical Bibliography of Ancient Egyptian Hieroglyphic Texts, Reliefs, And Paintings - I. The Theban Necropolis Part 1. Private Tombs, Second edition revised and augmented - Griffith Institute Ashmolean Museum Oxford
http://www.griffith.ox.ac.uk/topbib/pdf/pm1-1.pdf#page=338
Fouilles de Schiaparelli. Fonds documentaire Francesco Ballerini. CEFB, Come (Italie).
Shedding New Light on the 18th Dynasty Mummies of the Royal Architect Kha and His Spouse Merit
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4511739/
Statuette de Kha - Projet Rosette
http://projetrosette.info/popup.php?Id=1024&url=http%3A%2F%2Froot.projetrosette.info%2Fassets%2FTextes%2FfacSimile%2F108%2FStatuette_Kha.jpg&title=Statuette+de+Kha
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