vendredi 11 août 2017

Les peintres orientalistes en Égypte (V)


Frederick Goodall

Frederik Goodall - “Lumière sur les pyramides”

Frederick Goodall est né le 17 septembre 1822 à Londres dans une famille renommée de graveurs. Edward Goodall, son père, jouit d'une grande notoriété et reçoit de nombreux artistes, parmi lesquels David Roberts et William Turner. Frederick quitte l'école à 13 ans ; il est ensuite formé par son père "lequel l'astreignit à un contraignant cursus pendant huit ans ; 'on' décida rapidement qu'il serait peintre et non graveur".
Très tôt Frederick peut vendre ses toiles et commencer ainsi à voyager.
Il jouit d'une vie prospère et aisée. C'est en 1858, alors qu'il a 36 ans, qu'il découvre l'Égypte, muni de lettres d'introduction de David Roberts. Il y reste sept mois, subjugué par tout ce qu'il voit : "Je ne pouvais me retenir de m'exclamer tout haut devant ces scènes variées. Quelle beauté ! Quelle splendeur pittoresque ! Quels costumes ! Quels personnages ! Le fait est que j'étais parfaitement estomaqué devant la nouveauté de tout ce que je voyais, convaincu que ces gens n'avaient jamais été peints et que je me trouvais pratiquement sur un terrain vierge, libre."
Il loue une maison dans le quartier copte du Caire, apprend l'arabe, se familiarise avec les us et coutumes du pays… Il y retrouve Carl Haag, un autre peintre, et l'invite à partager sa demeure. Ils visitent le pays, campent dans le secteur de Guizèh, puis se rendent à Suez, puisant de multiples sources d'inspiration, ne cessant jamais de dessiner ou de peindre. Leur maison devient également un lieu de rencontre des artistes de passage.
Goodall rapportera de ce séjour un nombre important de peintures, esquisses et dessins qui, dès son retour à Londres, connurent un succès immédiat.
Afin de recréer scènes et ambiances, ses bagages étaient également chargés de nombreux objets égyptiens. Il n'hésita pas non plus à ramener… des moutons afin de pouvoir continuer à les peindre fidèlement !
En 1870, toujours habité par la même passion et le même amour pour l'Égypte, il ressent le besoin d'y revenir. Il s'installe alors dans une vieille demeure mamelouke au Caire, près de la Citadelle. L'appel du désert se faisant entendre, il part vivre quelque temps avec les bédouins ; il y trouvera de merveilleux sujets d'inspiration !
Les toiles qu'il rapportera de ce second séjour rencontreront le même succès.
Son enthousiasme pour l'Égypte jamais ne s'éteindra, et il ne cessera de peindre cette terre aimée…
marie grillot

sources :
Les Orientalistes de l’École britannique, Gerald M. Ackerman, ACR édition, 1991
History, memories and photographs of St John’s Wood, London

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Eugène Girardet

Eugène Girardet - "En dehors de la mosquée"

Eugène Girardet voit le jour le 31 mai 1853 à Paris au sein d'une famille d'origine suisse, huguenote, qui compte de nombreux artistes, peintres et graveurs.
Il étudie la gravure avec son père, Paul. Doté de dons certains, il rejoint l'Ecole des beaux-arts à Paris où il a pour maître Jean-Léon Gérôme.
Nourri par les récits enthousiastes de son professeur, l'attrait de l'Orient se fait grandissant. En 1874, il effectue son premier voyage en Afrique du Nord… Dès lors, sa vie sera ponctuée de nombreux séjours, du Maghreb à la Palestine.
C'est en 1898 qu'il découvre l'Égypte. Il s'attachera à reproduire non seulement des paysages mais aussi des scènes de la vie quotidienne. "Girardet était un peintre orientaliste dont l'attention se concentrait sur les paysages ainsi que sur la population colorée du monde arabe."
La prière du soir, les coutumes, les travaux du quotidien, les troupeaux de chèvres et petits bourricots, seront pour lui de multiples sources d'inspiration…
Sa fréquentation de l'Orient influencera non seulement sa façon de peindre, mais aussi l'utilisation des couleurs. Sa palette deviendra plus riche et le travail qu'il fera sur l'étude de la lumière lui permettra de restituer de fort belles atmosphères.
marie grillot

sources :
Les Orientalistes, peintres voyageurs, Lynne Thornton, ACR édition Poche Couleur, 1994
Le peintre Eugène Girardet”, Galerie Ary Jan
Gazette Drouot
Musées Midi-Pyrénées
Dictionnaire historique de la Suisse 

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Edward Lear

Edward Lear - "Abu Simbel"

"De tous les voyageurs qui se rendirent au Proche-Orient, Edward Lear aurait sans aucun doute été le plus agréable à accompagner" : voilà une phrase qui, d'emblée, nous rend ce personnage attachant ! Et pourtant… Il ne part pas dans la vie avec tous les atouts.
Vingtième enfant d'un couple qui subira un revers de fortune, rejeté par sa mère, fragile, hypocondriaque, vraisemblablement bipolaire, sujet à des crises d'épilepsie, doté d'un physique ingrat… Il réussira à surmonter tout cela, à être accepté, apprécié et à nouer de solides relations.
Dès l'âge de quinze ans, il gagne sa vie en donnant des leçons de dessin et en vendant ses propres productions.
Dès lors, et tout au long de sa vie, la vente de ses toiles lui permettra d'entreprendre de longs périples qui le mèneront notamment en Italie, en Grèce, en Turquie, en Albanie, à Malte, en Palestine et, de 1872 à 1874, en Inde et à Ceylan.
C'est en 1853 - 1854 qu'il effectue son premier voyage en Égypte. Il remonte le Nil et rapporte un nombre conséquent de croquis, d'une facture et d'une originalité touchantes. "Ces esquisses fournissaient la base de ses aquarelles et de ses peintures à l'huile, un peu comme des négatifs, et il les utilisa pendant des dizaines d'années."
S'il est fasciné par les voiles de felouques, son véritable coup de cœur a lieu à Philae, île qu'il estime "proche d'un véritable conte de fées". Il s'installe dans le temple d'Isis pendant une dizaine de jours, dessinant, peignant, sans relâche et avec une passion qui ne semble jamais assouvie.
Ainsi écrit-il à son épouse Ann, le 7 février 1854 : "Le grand temple d'Isis [...] est tellement merveilleux qu'aucun mot ne peut en donner la moindre idée."
Le temple ne constitue pas son seul sujet d'étude : il s'attache aussi à son environnement, à la luxuriance des palmiers, aux berges sablonneuses de l'île, à l'aridité des rochers, et à la douce limpidité du Nil.
C'est ainsi qu'à ses nombreuses aquarelles s'ajouteront une vingtaine de peintures à l'huile.
Il revient en Égypte en 1866 alors que se construit le canal de Suez. Il voyage cette fois-ci avec deux autres peintres, Thomas Seddon et William Holman Hunt (qui lui avait d'ailleurs donné des cours de peinture), ainsi qu'avec l'écrivain Sir Richard Burton.
De ses multiples périples, Edward Lear ramènera non seulement des œuvres peintes, mais aussi des poèmes, des chansons. Sa riche correspondance et son carnet intime révèlent également des facettes intéressants de sa personnalité.
"Nous vivons sur le Nil. Ce Nil, que nous aimons.
La nuit, nous dormons sur les falaises qui le surplombent,
Le jour, nous pêchons, et le soir, nous veillons
Sur de longues îles de sable jaune..."
marie grillot

sources :
Les Orientalistes de l’École britannique, Gerald M. Ackerman, ACR édition, 1991

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Charles Wilda

Charles Wilda - “Au bord de l'eau”

Charles Wilda est né le 20 décembre 1854 à Vienne, ville dans laquelle il étudiera à l'Académie des Beaux-Arts sous la tutelle du peintre Léopold Carl Müller. Ce professeur, qui avait succombé à l'orientalisme après avoir admiré à Paris les toiles d'Eugène Fromentin, lui enseignera non seulement les techniques de peinture mais l'incitera aussi à se rendre dans un pays cher à son cœur : l'Égypte ! L'orientalisme était alors "en vogue" et les œuvres de ce nouveau courant pictural très demandées… Nul doute que dans ce pays, aussi merveilleux qu'attachant, il trouverait de multiples sujets d'inspiration !
C'est ainsi que dans les années 1890 il s'installe au Caire où il ouvre un atelier. Il s'attache à reproduire la vie quotidienne qui s'offre à ses yeux. La rue l'inspire, il excelle dans les scènes reproduisant artisans, marchands de tapis, diseuses de bonne aventure, fumeurs de narguilé, charmeurs de serpents, porteurs d'eau… Il aimera aussi les bords du Nil avec les femmes à l'allure gracile qui viennent puiser de l'eau.
Les toiles qu'il nous livre sont, à n'en pas douter, le fruit d'une observation attentive, sublimée par l'utilisation d'une palette riche et subtile.
L'expression et l'attitude des personnages sont parfaitement étudiées et rehaussées par la chatoyance et le tombé de leurs vêtements.
Il travaille de façon tout aussi attentive le cadre dans lequel ils évoluent : l'environnement architectural est reproduit, avec le plus grand soin et avec force détails.
Ainsi, ses tableaux, qui reflètent une réalité qui aurait pu paraître "banale", semblent relever d'une mise en scène quasi théâtrale. C'est bien là, très certainement, tout le talent de l'artiste.
En 1889, rentré en Europe, il partage à Paris un atelier, avec un autre peintre orientaliste, son ami Arthur von Ferraris.
Charles Wilda se lancera également dans la création de fines gravures d'orientaliste.
Ses œuvres, peintes et gravées, connaissent un grand succès ; il participe à de nombreuses expositions, de Berlin à Vienne, en passant par Paris.
En 1907, année de son décès, la Künstlerhaus (Maison des Artistes) de Vienne l'honore d'une première rétrospective.
Il est désormais reconnu comme l'un des chefs de file de la peinture orientaliste autrichienne.
marie grillot

sources :
Les orientalistes peintres et voyageurs, Lynne Thornton, ACR Edition, 1993
Bonhams
Oxfordindex
Expertisez.com
de.wahooart.com/

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