La chapelle d'Akhethetep, sauvée des sables de Saqqara pour être exposée au Louvre |
"La musique et la danse étaient en Égypte aussi anciennes que la civilisation elle-même. Elles aidaient les plus humbles dans leur pénible existence. Les vignerons dansaient dans la cuve, pendant que deux compagnons leur battaient la mesure avec de petits instruments en bois. Au temps de la moisson, un joueur de flûte suivait les ouvriers et l'un de ceux-ci, mettant pour un instant sa faucille sons le bras, se campait devant le musicien et l'accompagnait en battant des mains. Le Pharaon entretenait dans son palais des danseuses et la charge de préposé aux exécutions musicales valut à l’un de ses titulaires, sous Assi, d'être enterré dans un superbe mastaba de la nécropole memphite. Les grands personnages, dans la mesure de leurs ressources, imitaient le maître. Observateurs fidèles des usages et des coutumes, les artistes représentèrent sur les murs de la tombe des musiciens donnant un concert et des danseuses exécutant des figures. Dès cette époque lointaine, on aimait à s'abandonner au charme de la musique et des représentations chorégraphiques lorsque tout souci matériel était écarté."
(extrait de "Scènes de la vie privée dans les tombeaux égyptiens de l'Ancien Empire", 1925)
Sur Pierre Montet
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Une journée en Égypte avec… José-Maria de Heredia (1842-1905), poète d’origine cubaine, né sujet espagnol, naturalisé français. Il est considéré comme l’un des maîtres du mouvement parnassien.
Grand Temple de Karnak - collection Schroeder et Cie |
"La lune sur le Nil, splendide et ronde, luit.
Et voici que s’émeut la nécropole antique
Où chaque roi, gardant la pose hiératique,
Gît sous la bandelette et le funèbre enduit.
Tel qu’aux jours de Rhamsès, innombrable et sans bruit,
Tout un peuple formant le cortège mystique,
Multitude qu’absorbe un calme granitique,
S’ordonne et se déploie et marche dans la nuit.
Se détachant des murs brodés d’hiéroglyphes,
Ils suivent la Bari que portent les pontifes
D’Ammon-Ra, le grand Dieu conducteur du soleil ;
Et les sphinx, les béliers ceints du disque vermeil,
Éblouis, d’un seul coup se dressant sur leurs griffes,
S’éveillent en sursaut de l’éternel sommeil."
(extrait de "Les Trophées", 1893)
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Une journée en Égypte avec…Gaston Migeon (1861-1930), conservateur au département des objets d’art du Moyen Âge, de la Renaissance et des Temps modernes au musée du Louvre
Photo de Jean Pascal Sébah (1872 - 1947) |
"Les Pyramides dépassées, on descend par des pentes de sable, et le Sphinx apparaît. “Enfoui jusqu'au poitrail, rongé, camard, dévoré par l'âge, tournant le dos au désert, et regardant le fleuve, ressemblant par derrière à un incommensurable champignon, et par devant à quelque divinité précipitée sur terre des hauteurs de l'Empyrée, il garde encore malgré ses blessures, je ne sais quelle sérénité puissante et terrible qui frappe et saisit jusqu'au profond du cœur.”
Il inspire une crainte indéfinissable, tant sa face reste impénétrable, tant ses yeux vides semblent garder la vision d'une foule de choses lointaines, ignorées et terribles. Que fait-il là, unique monument de son âge, impassible sous le ciel, perdu dans la solitude ? Tous les peuples ont passé devant lui, et se sont évanouis. On est tenté de lui dire : “Ah ! si tu pouvais parler !” Sentinelle muette du Désert, enracinée à la chaîne Lybique, il disparaîtrait un peu plus chaque jour sous l'envahissement des sables, si l'on ne prenait soin de le déblayer. Son corps qui se délite, n'offre plus que vaguement l'aspect du lion, et le cou dans son effritement est devenu un peu mince pour le volume de la tête. Le nez a été brisé par la brutalité des Barbares. Et cependant nulle œuvre sortie de la main des hommes n'offre plus de force et plus de souveraine grandeur. On n'oublie plus jamais, quand on les a vus, l'intensité et la profondeur de pensée de ces yeux qui regardent si loin, par delà la réalité des choses.” (extrait de "Le Caire, le Nil et Memphis", 1906)
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