En 1859, Auguste Mariette revient au Caire où il est "confirmé à la tête des Monuments historiques et du musée". Ses projets sont nombreux et les chantiers qu'il ouvre dans le Delta, à Thèbes où à Saqqarah, sont à la hauteur de ses ambitions. Ils amèneront de fort belles découvertes.
C'est ainsi notamment qu'en 1860, il découvre, à Saqqarah, dans le mastaba C8, la statue de Ka-Aper (Kaaper), le très célèbre Sheikh el-Beled !
La même année, au nord du complexe pyramidal du pharaon Djoser - où 140 mastabas seront mis au jour - sera découvert celui d’Hésiré (Hosi, Hésyra, Hésy-Rê, Hézirê).
Nécropole de Saqqarah - Plan extrait de "Les Mastabas de l'ancien empire", Auguste Mariette, Paris, 1889 |
Dans "Les mastabas de l'Ancien Empire", Auguste Mariette et Gaston Maspero rappellent que les mastabas se composent généralement de : "cinq parties qui sont l'extérieur du tombeau, l'intérieur proprement dit, le serdab, le puits, le caveau souterrain".
Dans cet ouvrage, les pages consacrées précisément au mastaba d’Hésiré - référencé A3 - ne comportent que des dessins. Aucune précision n'est donnée sur les circonstances exactes de la découverte.
La demeure d'éternité d'Hésiré est datée de la IIIe dynastie, soit vers 2700 av. J.-C. "Dans son état d'origine, le mastaba avait 43 m de long, 22 m de large et 5 m de haut. Il était fait de briques de boue durcies. Les parois intérieures et extérieures étaient complètement recouvertes de calcaire blanc. La structure de la chambre intérieure était constituée d'un long couloir et de plusieurs salles et chapelles."
Onze niches sont creusées dans le mur ouest : elles sont décorées de magnifiques panneaux en bois, rectangulaires, de plus d'un mètre de hauteur sur 40 cm de largeur. Ils sont sculptés avec une précision, une finesse, un art incomparables. Ces panneaux devaient jouer : "le rôle de fausses-portes qui figurent le défunt dans l'Au-delà, en attente de ses offrandes". Ils étaient fixés : "par des coins enfoncés dans la partie supérieure des panneaux".
Les panneaux de bois du mastaba d'Hésiré découvert en 1860 par Auguste Mariette à Saqqarah IIIe dynastie - 2649-2575 av. J.-C. Musée du Caire - JE 28504 = CG 1426 - CG 1427 - CG 1428 |
Dans "L'Art égyptien au temps des pyramides", il est précisé que : "les cinq premiers ont été trouvés par Mariette et transportés au musée en 1866".
Un sixième sera découvert, 45 ans plus tard, par James Edward Quibell qui reprendra les fouilles du mastaba en 1911-1912.
Quant aux cinq autres, il ne restait que des fragments : "qu'il ne prendra malheureusement pas la peine de sauver".
A wooden panel in position, from a pencil drawing by F. H. Darke "Excavations at Saqqara (1911-1912). The Tomb of Hesy", J.E. Quibell, Le Caire, 1913 |
Sous les numéros 1037 - 1038 - 1039, trois de ces panneaux sont présentés par Gaston Maspero dans le "Guide du Visiteur du musée de Boulaq" : "Ces trois panneaux étaient encastrés dans autant de stèles en forme de fausse porte. Un quatrième panneau, plus mutilé que les autres, est exposé (n° 913) sur l'espèce d'étagère qui règne au fond de la salle (!). Le scribe Hosi, assis ou debout, est le seul personnage représenté. Il a la figure rude, les traits accentués par l'âge : les hiéroglyphes sculptés au-dessus de sa tête nous donnent son nom et ses titres… Inscriptions et figures sont découpées avec une sûreté de main extraordinaire : l'artiste qui a exécuté ce travail ne le cédait en rien à celui qui a sculpté le Sheik el-Beled."
Les panneaux présentés à Boulaq doivent correspondre à ceux qui ont été enregistrés au Journal des Entrées du Musée Egyptien du Caire JE 28504, et au Catalogue Général CG 1426 - CG 1427 - 1428.
Hésiré est représenté debout, assis, dans diverses attitudes, avec différentes perruques ou tenues. Les panneaux semblent raconter, "en bande dessinée", autant de moments importants de sa vie, auréolés de la gloire de ses attributions. La raideur dans l'attitude fait ressentir avec plus de force l'importance de son rang et la solennité de ses fonctions.
Lors de l'Exposition universelle de 1878, inaugurée le 1er mai à Paris, Auguste Mariette choisira d'exposer les trois panneaux. Ils constituèrent alors les pièces les plus anciennes illustrant les antiquités pharaoniques présentées au Palais du Trocadéro.
Dans le catalogue qu'il rédigera pour cette manifestation, "Exposition universelle de Paris, 1878. La Galerie de l'Égypte ancienne à l'exposition rétrospective du Trocadéro, description sommaire, par Auguste Mariette-Bey...", il expliquera de façon admirable, et avec une belle sensibilité, les raisons de son choix en soulignant le caractère exceptionnel de l'œuvre. "Comparé au style des autres monuments de l'Ancien-Empire, le style des panneaux prend en effet dans l'art égyptien la place de ce qu'on appelle autre part le style archaïque. Les finesses de la gravure, le groupement inusité des hiéroglyphes et les formes rares de plusieurs d'entre eux, l'arrangement jusqu'à présent unique des ustensiles que le personnage porte dans les mains, sont en effet des traits distinctifs qui nous montrent dans les trois panneaux des monuments extraordinairement anciens. On remarquera surtout le caractère de la tête dont les joues osseuses et le nez fortement aquilin n'ont absolument rien qui rappelle la figure pleine, le nez rond, les lèvres épaisses et souriantes des autres statues de l'ancien Empire."
Le 25 janvier 2021, le Ministère des Antiquités annonçait que : "dans le cadre général du 'Lancement du projet de restauration des panneaux en bois de Musée égyptien à Tahrir', sous le titre 'Vers de nouveaux horizons pour évaluer la situation, la restauration et la réapparition au musée', le musée égyptien avait lancé le projet de restauration des panneaux en bois de Hassi Ra, exposés au rez-de-chaussée du musée, en coopération avec l'Institut Français d'Archéologie Orientale (IFAO)". Et il ajoutait que "La seconde phase du projet consisterait en l'étude de leur "nouvelle exposition" au musée, leur "réinstallation" devant rappeler le contexte de leur présentation "originale" dans le mastaba…
marie grillot
sources :
Les Mastabas de l'ancien empire, Paris, 1889, Mariette Auguste, Maspero, Gaston
Exposition universelle de Paris, 1878. La Galerie de l'Égypte ancienne à l'exposition rétrospective du Trocadéro, description sommaire, par Auguste Mariette-Bey…
Guide du visiteur au musée de Boulaq (édition 1883), Gaston Maspero
L'Art égyptien au temps des pyramides, Réunion des Musées Nationaux, 1999
Trésors d'Égypte - Les merveilles du musée égyptien du Caire, Francesco Tiradritti
Les trésors de l'Égypte ancienne au musée du Caire, National Geographic
Catalogue officiel - Musée égyptien du Caire, Mohamed Saleh, Hourig Sourouzian, Verlag Philipp von Zabern, 1987
The Egyptian Museum in Cairo, Abeer El-Shahawy, Matḥaf al-Miṣrī
Excavations at Saqqara (1911-1912). The Tomb of Hesy, J.E. Quibell, Le Caire, 1913
“La tombe d'Hesyrê à Saqqara (A3)”
“Saqqarah” (La Balance des 2 terres)
PL. XXIX et suivants
Album du musée de Boulaq : comprenant quarante planches / photographiées par MM. Delié et Béchard ; avec un texte explicatif par Auguste Mariette-Bey
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