mardi 14 février 2017

Schiaparelli : grand nom de l'égyptologie

Ernesto Schiaparelli entre Nefertari et Kha

Ernesto Schiaparelli - dont le nom restera à jamais associé à la découverte de la plus belle tombe de la Vallée des Reines, celle de Nefertari - naît le 12 juillet 1856 dans le Piémont italien, à Occhieppo Inferiore. Il est issu d'une famille d'intellectuels et de personnalités, comme l'historien Luigi Schiaparelli, ou encore la créatrice de mode Elsa Schiaparelli qui tiendra une maison de haute couture à Paris dans les années 1930-1950.
Gaston Maspero

C'est à Turin qu'il suit des cours d'égyptologie : il est alors l'élève de Francesco Rossi. Puis il vient à Paris au Collège de France où Gaston Maspero "accueille des élèves en auditeurs français et étrangers" : il suivra ses cours de 1878 à 1880. 

En 1880, il devient directeur de la section égyptienne du musée de Florence, poste qu'il conservera jusqu'en 1894.

Parallèlement, on le retrouve, en 1882, à l'École du Caire - autre nom de la toute nouvelle Mission Archéologique Française Permanente en Égypte - que vient de créer Gaston Maspero, l'ouvrant à des "missionnaires français et étrangers" (cette mission deviendra l'IFAO en 1898).

Schiaparelli commence à fouiller dans la nécropole des gouverneurs d'Éléphantine de Qubett el-Hawa, à Assouan, plus précisément la tombe d'Harkhuf.

Il crée la mission archéologique italienne, "financée personnellement par le roi Victor Emmanuel III et soutenue par des crédits du ministère de l'Instruction publique et de celui des Affaires étrangères". Il la dirigera pendant 17 ans.

En 1903, il demande à Gaston Maspero une concession sur le site de Guizeh. La zone des pyramides est tellement convoitée que les concessions se touchent ; ainsi, pour éviter tout litige, toute histoire de mauvais "voisinage", les fouilleurs se voient-ils dans l'obligation de marquer leur secteur : "Reisner en jaune, Schiaparelli en brun-rouge et Steindorff en bleu" !

Il sollicite ensuite la permission d'entreprendre des fouilles dans la Vallée des Reines : il la conservera de 1903 à 1906. Avec son proche collaborateur Francesco Ballerini, ils 'redonneront vie' à cette nécropole, peu fouillée jusqu'alors. 
La tombe de Nefertari lors de sa découverte

En effet, dans cette "ta set neferou", dédiée aux reines, princesses et princes du Nouvel-Empire - qui deviendra un cimetière populaire aux époques ptolémaïque et romaine - ils découvriront plus de 100 tombes (ou simples puits). Parmi elles, celles des princes Amonherkhepshef et Khaemouaset qui sont ouvertes aujourd'hui au public. 

Mais la plus belle, la plus extraordinaire de leurs découvertes a lieu en 1904, sur le versant nord du ouadi principal… Il s'agit de la tombe de Nefertari, grande épouse du pharaon Ramsès II. 

Lors de la découverte, l'escalier est rapidement dégagé par les ouvriers, mais la porte qui devait protéger la sépulture est ouverte : "Des déblais avaient glissé, pénétré dans la première salle et ce remplissage atteignait presque le plafond, note Schiaparelli. Le sol de la tombe est entièrement recouvert de boue solidifiée…" Le déblaiement sera long et fastidieux, mais il livrera de telles splendeurs ! Il est à noter qu'alors, l'inspecteur général des monuments de Haute-Égypte qui supervisera la découverte n'est autre qu'Howard Carter.
Statue de l'architecte Kha

En 1905, Schiaparelli débute ses premières excavations à Deir el-Medineh. "Il explore la partie nord de la nécropole et découvre la chapelle de la tombe de Maia, peintre de la fin de la XVIIIe dynastie, après le règne d'Akhénaton, vers 1330-1320 av. J.-C. En 1906, la chance lui sourit encore puisqu'il découvre intacte la tombe de l'architecte Kha et de sa femme Méryt, personnages éminents de la fin du XVe siècle avant notre ère.
Transport du mobilier funéraire de la tombe de Kha et Méryt

"Cette découverte éblouit les fouilleurs : après avoir déposé les sceaux qui obturaient la porte du caveau, Schiaparelli met au jour la totalité du mobilier funéraire du couple, qui forme aujourd'hui un ensemble admirable au musée de Turin. S'y trouvent des lits, des sarcophages, des draps, des guéridons, des chaises, des instruments de mesure, de la nourriture, des fleurs et des coffres qui contenaient le nécessaire de toilette ou de couture de la dame Méryt, autant d'objets dont le caractère intime et familial ne cesse d'étonner. Sur les sarcophages étaient encore disposés les bouquets de fleurs, abandonnés par les parents des défunts lors de l'enterrement. En bon égyptologue, Schiaparelli ne néglige pas la documentation moins spectaculaire mais tout aussi riche de renseignements sur le site. 
Il recueille de nombreux monuments inscrits en hiéroglyphes, des statues, des stèles, ainsi que des ostraca et des papyrus, qu'il rapporte Turin."

Il s'intéresse également aux petits sanctuaires rupestres consacrés à Ptah et Meretseger et débute le dégagement de quelques maisons du village.

Ernesto Schiaparelli a fouillé l'Égypte du Nord au Sud : de Guizeh à Héliopolis, d'Hermopolis à Assiout, de Quau el-Kebir à Gebelein, de Thèbes à Assouan…

Autant de sites explorés qui lui ont permis d'enrichir les collections des musées dans lesquels il a exercé, tout d'abord Florence, puis surtout Turin qu'il a dirigé à partir du 30 septembre 1894, et dont il fera le second musée d'antiquités égyptiennes après celui du Caire. Autant de sites explorés qui nous permettent de mieux connaître certaines pages de l'Égypte ancienne, et certainement des plus belles !

Il meurt à Turin le 17 février 1928 : "laissant à ceux qui l'avaient connu le souvenir des grands idéaux dans lesquels il croyait : la religion, la patrie et sa bien-aimée Egypte".

marie grillot

sources :
Who Was Who in Egyptology, Bierbier M.L., London, Egypt Exploration Society
Lettres d'Égypte, Correspondance avec Louise Maspero, Gaston Maspero, Seuil, 2003
Gaston Maspero le gentleman égyptologue, Elisabeth David, Pygmalion, 1999
Les artistes de pharaon, Deir el Medineh et la Vallée des Rois, Louvre, 2002
"Ernesto Schiaparelli e Francesco Ballerini" (Laboratorio Rosso)
Howard Carter, The path to Tutankhamun, T.G.H. James, TPP, 1992
Les chercheurs du passé 1798-1945 : Aux sources de l’archéologie, Ève Gran-Aymerich
"
Il y a 110 ans Schiaparelli découvrait la demeure d'éternité de la sublime Nefertari("égyptophile")
"Francesco Ballerini, pionnier de l'égyptologie italienne" ("égyptophile") 

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