L’astronomie fait partie, depuis les temps les plus anciens, de la culture égyptienne, en tant que science pure (cf. l’École d’Alexandrie où l’observation des étoiles et des planètes a atteint un grand degré de complexité) ou appliquée. Nous trouvons trace des déductions pratiques de ce savoir notamment sur le site préhistorique de Nebta Playa, avec son calendrier de pierres dressées, ou encore dans la configuration des pyramides de Guizeh et celle du temple d’Abou Simbel, ainsi qu’à Denderah, avec son célèbre Zodiaque.
Autant de preuves évidentes que les Égyptiens faisaient place, dans la construction de leurs monuments les plus importants, à l'observation des astres et à leur mouvement : "avec une habileté incomparable".
Au XIe siècle, à l’époque fatimide, des observatoires sont construits sur les collines du Moqattam, à l’est du Caire. Le mathématicien et astronome Ibn Yunus (mort à Fustat en 1009) s’illustre par son traité "Al-Zij al-kabir al-Hakimi" ("la Grande Table - astronomique - kakémite"), dans lequel il multiplie les observations sur les conjonctions des planètes et les éclipses.
Inspiré par l’élan de modernisme qu’insuffle Méhémet Ali (1769-1849), Mahmoud pacha, le bien nommé "El-Falaki" -"l’astronome" (1815-1885), contribue au développement en terre d’Égypte de la science qu’il affectionne. Il bénéficie, pour ce faire, de la construction d’un observatoire à Boulaq, en 1840, où, sur les recommandations du khédive Ismaïl pacha, il observera l’éclipse solaire de 1860. En 1865 (1868 ?), à la demande d’Al-Falaki pacha, un second observatoire est construit à Abbassiya, autre quartier du Caire. Pour cause d’expansion urbaine, il sera transféré, en 1903, à Helwan, au sud du Caire, où le nouveau bâtiment est construit sur une colline de 116 m de hauteur, à l’est de la ville. L’endroit a été choisi pour son altitude et la pureté de son atmosphère, permettant l’observation astronomique "avec netteté" (il n’y avait pas alors d’usine sidérurgique sur place !).
Cet observatoire est doté d’un télescope réflecteur de 30 pouces, offert par John Henry Reynolds, trésorier de la Société royale britannique d’Astronomie. C’est dès lors un établissement pilote pour l’observation des phénomènes astronomiques, la découverte des planètes, la photographie des nébuleuses, les observations et prévisions météorologiques... Il est en outre particulièrement chargé du service de l’heure pour l’Égypte (observations liées aux rites religieux de l’Islam : prière, jeûne du Ramadan, pèlerinage à la Mecque...).
En 1948, suite à une commande du gouvernement égyptien, l’observatoire est équipé d’un télescope réflecteur de 74 pouces, provenant de la société britannique Grub Parsons.
Les bâtiments historiques de l’observatoire de Helwan existent toujours et sont en bon état. Ils sont construits en briques et coiffés d’une toiture en bois pour assurer une isolation thermique. Le bâtiment central comporte une tour météorologique de 15 mètres : il abrite le musée, les salles des horloges, des laboratoires de microphotométrie et spectroscopie…
Différents noms ont été donnés à l'institut : tout d’abord Observatoire khédivial de Helwan (1903), puis Observatoire royal (1946), et finalement, Institut national de recherche en astronomie et géophysique (1986). Chacune de ces deux principales branches scientifiques se compose de plusieurs départements, laboratoires et unités.
comète de Halley |
Au nombre des titres de gloire de l’observatoire, nous relevons : l’observation, entre 1909 et 1911, de la comète de Halley, grâce au réflecteur de 30 pouces, premier grand télescope en Afrique et au Moyen-Orient jusqu'en 1945 ; le développement de la classification des galaxies modernes ; la participation, de 1914 à 1921, au programme international de mesure des fluctuations de la constante solaire ; l’observation des éclipses solaires totales de 1952 et 2006 ; l’observation du huitième satellite de Jupiter…
En 1964, l’observatoire de Helwan est complété par celui de Kottamia, situé à 80 km du Caire dans la direction de Suez, équipé du plus grand télescope dans le monde arabe. L'une des réalisations les plus importantes de cette extension est sa participation aux observations faites de la surface lunaire pour choisir des sites d'atterrissage humain à la fin des années soixante.
Pour son emplacement, ses réalisations scientifiques, la valeur historique de ses bâtiments et le rôle social qu’il joue (accueil du public), l’observatoire de Helwan a été inscrit sur la liste indicative de l’Unesco, étape préliminaire avant une inscription au patrimoine mondial. "Toute (sa) longue histoire pleine de succès témoigne de l’habileté des astronomes égyptiens et de l’efficacité de leur rôle national et mondial. Sans oublier que cet observatoire est le plus ancien qui existe encore en pleine activité, ce qui double sa valeur. Ce qui explique la décision de l’Unesco." (Doaa Elhami, "Al-Ahram Hebdo", 20 avr. 2011)
Marc Chartier
sources :
hebdo.ahram.org.
nriag.sci.eg/
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