jeudi 9 juin 2016

Un collier "ousekh" de la princesse Noub-Hotep

Collier ousekh de la princesse Noub-Hotep - or, cornaline, amazonite (?), émeraude - XIIe dynastie - règne d'Hor
découvert sur sa momie par Jacques de Morgan, le 19-4-1894, à Dahchour près de la pyramide d'Amenemhat III
Musée Égyptien du Caire - Têtes épervier en or du contrepoids : CG 53152 - JE 30940 ; du collier : CG 53153-53154 (JE 30939 en commun) - Rangs de perles (JE 30945 ?)


Au cours des saisons 1894-1895, Jacques de Morgan - qui est depuis deux ans à la tête du Service des antiquités d'Egypte -, fait d'incroyables découvertes sur le site de Dahchour. Après avoir, le 16 avril 1894, mis au jour le tombeau du roi Fou-ab-Ra Hor ou Aou-ab-RA Hor dont l'existence était jusqu'alors inconnue, et dont la statue de bois sombre, surmontée du signe ka, est devenue l'une des plus emblématiques du musée du Caire, il poursuit plus avant ses fouilles ...


Afin de mieux visualiser le récit qui suit, il convient de rappeler les grandes lignes de l'architecture des tombeaux de Dahchour telle qu'il la présente : "les tombeaux de la XIIe dynastie à Dahchour se composent d'un mastaba construit à la surface du sol d'un puits généralement placé au nord du mastaba et d'un appartement funéraire situé sous le monument extérieur" …  Informations auxquelles il ajoute notamment que : "Tous les éléments du tombeau, mastaba, puits, couloirs, chambres, niches destinées aux canopes sont découpés à angle droit ; leur orientation est constante pour chaque partie. Le sarcophage est toujours placé du nord au sud. Les canopes sont toujours à l'est du mort. Il n'existe presque jamais d'inscriptions sur les sarcophages de pierre et les caisses à canopes ; les murailles sont toujours nues, sans sculptures ni peintures"…


Le 19 avril 1894, il trouve l'entrée d'un puits, puis d'un second. 

Plan du tombeau de la princesse Noub-Hotep 
découvert par Jacques de Morgan, le 19 avril 1894, à Dahchour dans le secteur de la pyramide d'Amenemhat III
publié dans "Fouilles à Dahchour", Jacques de Morgan, 1894


Celui-ci ouvre sur un couloir voûté, long de plus de 14 m qui débouche sur une large "muraille de pierre blanche". Ce mur est en fait l'entrée - inviolée ! - de ce qu'il nomme les "appartements funéraires" de la princesse (ou fille royale) Noub-Hotep- ta-Khroudit.


"Parmi ses titres, il n'est jamais fait mention qu'elle eut été reine. Et cependant j'ai rencontré dans son tombeau tous les attributs de la royauté"…. précise-t-il, la même année, dans "Lettre sur les dernières découvertes en Égypte"). 


Et, dans les "Actes du Dixième Congrès International des Orientalistes" (10, 1894, Genève), il émet cette hypothèse : "Les tombeaux du roi Hor et de la princesse Noub-Hotep ainsi que les détails de leur mobilier funéraire montrent clairement que ces deux personnages ont été ensevelis à la même époque. Devons-nous admettre que la princesse était soit la femme, soit la fille du souverain près duquel elle reposait ?"  


Dans la "crypte" se trouvent divers objets, comme des vases, un miroir, une boîte à parfums, mais aussi des éléments de vaisselle, des oiseaux et pièces de viande, des cannes, des bâtons, ou encore une massue et des flèches … 


Dans un cercueil en bois, recouvert d'or, repose la momie : "elle avait beaucoup souffert des effets de l'humidité. Jadis le corps avait été placé dans une enveloppe de plâtre doré, mais il ne restait plus au fond du cercueil, qu'un amas de poussières dans lequel les os et les divers objets avaient conservé leur position respective"…

Découverte par Jacques de Morgan, le 19 avril 1894, à Dahchour dans le secteur de la pyramide d'Amenemhat III, la momie de la princesse Noub-Hotep reposait dans son cercueil 
Dessin publié dans "Fouilles à Dahchour", Jacques de Morgan, 1894

Comme on peut le voir sur une illustration publiée dans "Fouilles à Dahchour",  un collier "ousekh" lui recouvrait la poitrine.


"Les têtes d'épervier étaient posées sur les humérus, les perles et les pendeloques gisaient sur la poitrine" rapporte de Morgan. Il indique par ailleurs que : "Il a été impossible de se rendre un compte exact de la disposition des perles d'or de cornaline et de lapis-lazuli qui composaient le collier. Le travail de reconstitution ne pourrait être fait qu'en s'inspirant des représentations qui se voient si souvent sur les caisses des momies. On a retrouvé un nombre considérable de pendeloques d'or avec incrustations de cornaline, d'émeraude d'Egypte et de pierre brunâtre. Elles étaient probablement disposées sur la circonférence de cette riche parure…".

"Fouilles à Dahchour", Jacques de Morgan, 1894 :  Éléments du collier ousekh de la princesse Noub-Hotep
 or, cornaline, amazonite (?), émeraude - XIIe dynastie - règne d'Hor
découvert sur sa momie par Jacques de Morgan, le 19-4-1894, à Dahchour près de la pyramide d'Amenemhat III
Musée Égyptien du Caire - Têtes épervier en or du contrepoids : CG 53152 - JE 30940 ; du collier : CG 53153-53154 (JE 30939 en commun) - Rangs de perles (JE 30945 ?)


L'état "fragmentaire" de cette parure explique que, dans son catalogue "Bijoux et orfèvreries", Emile Vernier ne la décrit pas dans son ensemble mais en trois "notices" : l'une pour la tête d'épervier du contrepoids CG 53152 (JE 30940), une seconde pour les têtes d'épervier du collier CG 53153-53154 (JE 30939 en commun) et la dernière pour les rangs de perles (JE 30945 ?).


Après sa découverte, ce collier a fait l'objet d'une étude, puis d'un ré-enfilage mais nous ne pouvons toutefois être assurés qu'il s'agit bien là de son aspect d'origine.

Collier ousekh de la princesse Noub-Hotep - or, cornaline, amazonite (?), émeraude - XIIe dynastie - règne d'Hor
découvert sur sa momie par Jacques de Morgan, le 19 avril 1894, à Dahchour près de la pyramide d'Amenemhat III
Musée Égyptien du Caire - Têtes épervier en or du contrepoids : CG 53152 - JE 30940 ; du collier : CG 53153-53154 (JE 30939 en commun) - Rangs de perles (JE 30945 ?)


Il s'épanouit en sept rangs de perles cylindriques, tubulaires, alternant cornalines, amazonites (?), séparées à intervalles réguliers, par des rangs de perles beaucoup plus petites en or … Le dernier rang est, lui, composé de pendeloques, relativement espacées, en forme de larmes - ou de gouttes - en or, incrustées d'amazonite (?), d'émeraude et de cornaline.


Le collier est fermé par deux têtes d'épervier en or, l'une tournée vers la droite, l'autre vers la gauche. "Chacun de ces objets, qui ne pèse pas moins de 80 grammes, est creux à l'intérieur et percé d'un trou au sommet du crâne. En bas au contraire, la cavité est fermée par une petite bande d'or percée de trous régulièrement espacés. Les fils du collier passaient par ces pertuis pour aller se réunir et passer à l'ouverture capitale où ils étaient sans doute noués". 


Emile Vernier continue cette description en précisant que : "Le travail est très beau et d'une simplicité remarquable, laquelle ajoute encore à la grandeur de ces bijoux. L'exécution a été faite au repoussé et la tête détourée ensuite a été, comme d'ordinaire, soudée sur une plaque d'or plate qui s'est très légèrement bombée au courant du travail".

Contrepoids du collier ousekh de la princesse Noub-Hotep
or, cornaline, amazonite (?), émeraude - XIIe dynastie - règne d'Hor
récouvert sur sa momie par Jacques de Morgan, le 19 avril 1894, à Dahchour près de la pyramide d'Amenemhat III 
Musée Égyptien du Caire - Têtes épervier en or du contrepoids : CG 53152 - JE 30940 ;  du collier : CG 53153-53154 (JE 30939 en commun) - Rangs de perles (JE 30945 ?) 


Le contrepoids, qui retombe dans le dos, est assorti au collier, lui répondant avec grâce, avec ses rangs de perles qui partent en s'élargissant. Quant à sa tête d'épervier en or, elle présente un profil tourné vers la droite et apparaît comme une réplique miniature des deux autres…

Très ressemblant au collier de la princesse Noub-Hotep, celui de la princesse Neferouptah
 de la XIIe dynastie également
découvert en 1956 dans sa tombe inviolée à Hawara, par le service des antiquités d'Egypte 
Musée égyptien du Caire - JE 90199


Ce collier est très ressemblant de celui de la princesse Neferouptah (Musée égyptien du Caire - JE 90199), retrouvé, en 1956 à Hawara dans le Fayoum : ils constituent, très certainement, de magnifiques exemples du travail réalisé par les orfèvres de la XIIe dynastie…


marie grillot

 

sources :

Jacques de Morgan, Fouilles à Dahchour, Vienne, 1894

http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/morgan1895/0120?sid=3d7e95ce585cabaf941996a4b974b22a

Jacques de Morgan, Lettre sur les dernières découvertes en Égypte, Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 38e année, N. 3, 1894. pp. 169-177

https://doi.org/10.3406/crai.1894.70401 https://www.persee.fr/doc/crai_0065-0536_1894_num_38_3_70401

Jacques de Morgan, Fouilles a Dahchour : Mars - Juin 1894, Vienne, 1895

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1895_num_39_2_70560?_Prescripts_Search_tabs1=standard&

Jacques de Morgan, Actes du dixième Congrès International des Orientalistes, Session de Genève, 10-1894

https://books.google.fr/books?id=JcoUAAAAIAAJ&pg=PA20&lpg=PA20&dq=princesse+noub-hotep&source=bl&ots=arYMSTDZaK&sig=KV9jEKkLK4xtgIHrcjBJVF5YPgk&hl=fr&sa=X&ved=0ahUKEwjsoY_p1f3MAhWBbhoKHRP4AJ4Q6AEIJjAC#v=onepage&q=princesse%20noub-hotep&f=false

Émile Vernier, Bijoux et orfèvreries. Fascicule 3, Numéro 52640-53171, Impr. de l'Institut français d'archéologie orientale, Le Caire, 1907-1927 

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57740426/f9.item.r=.langFR

National Geographic, Les Trésors de l'Egypte ancienne au musée égyptien du Caire, 2004



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