mercredi 16 septembre 2015

Albert Gayet, archéologue de "l'Égypte de l'antiquité tardive"


C'est dans un milieu plutôt aisé qu'Albert Gayet naît à Dijon, en Bourgogne, le 17 septembre 1856. Au décès de son père, il s'installe à Paris avec sa mère et ses soeurs. Il intègre l'École des Beaux-Arts - où sa fascination pour les arts de l'Orient se concrétise -, puis l'École pratique des Hautes Études, section histoire et philologie égyptiennes
, où il devient l'élève de Gaston Maspero.
Albert Gayet

En 1881, il vient pour la première fois en Égypte, avec la Mission archéologique française permanente au Caire. Pendant les premières années, il travaille en Haute-Égypte, plus particulièrement à Louqsor où, à la demande de Maspero, il va  : "lever le plan du temple de Louqsor, pour en tenter une restauration sur papier". Il travaille également sur la rive ouest, au temple des millions d'années de Ramsès, le Ramesseum.

Puis Gaston Maspero le pousse : "dans une direction encore mal connue : l'archéologie de l'Égypte de l'antiquité tardive". Dans un premier temps, il réalise : "des relevés dans les églises et les couvents de Haute et Moyenne-Égypte, recevant pour ce faire la bourse Henri-Giffard". Il devient ainsi le précurseur des études coptes, étudiant l'architecture, la sculpture, la peinture, apportant la lumière sur une époque et un art encore méconnus.

En 1896, avec l'appui de son mécène Emile Guimet, il débute les fouilles dans la cité d'Antinopolis (Antinoé). Cette ville, qui existait déjà au Nouvel Empire, fut rebaptisée par Hadrien au Ier siècle du nom de son bel amant Antinoüs. À l'âge de 20 ans, l’éphèbe vient de s'y noyer dans le Nil et l'empereur, inconsolable, glorifie ainsi sa mémoire, ne cessant de chérir son souvenir, allant jusqu'à le déifier... 

Située à 300 km du Caire, Antinoé devient, pendant quinze fructueuses années, "le" secteur de Gayet. Alors que son but est "de rechercher des documents relatifs à la fusion du symbolisme égyptien dans le symbolisme hellénique", il va de découvertes en découvertes. Le passé archéologique d'Antinoé, qui selon la volonté d'Hadrien devait : "contrôler toute l'administration de la Haute-Égypte", se révèle aussi riche que diversifié. Gayet met au jour des vestiges de l'époque d'Aménophis IV et est amené à dégager plusieurs temples dédiés à Ramsès II, Sésostris, Isis-Déméter, ou bien encore Sérapis. Il découvre également des thermes, un amphithéâtre, un hippodrome, des arcs de triomphe...
Antinoé - l'Arc de Triomphe

Quant aux nécropoles coptes, elles vont livrer des renseignements inestimables sur les rituels, les modes d'ensevelissement et un matériel funéraire de la plus haute importance. Un nombre important de figurines religieuses sont découvertes, ainsi que des objets du quotidien, mais aussi et surtout des tissus d'une somptueuse beauté. La momification n'est quasiment plus pratiquée, et le défunt est dès lors enterré dans ses plus beaux vêtements. "L’archéologue met au jour les sépultures de plusieurs 'dames romaines', inhumées avec leurs plus riches atours et reposant sur de précieux coussins funéraires, et d’un 'officier', vêtu d’un manteau de couleur carmin garni de parements de soierie."

Parmi les trésors se trouve le "châle de dame Sabine" qui est aujourd'hui exposé au Louvre.

Gayet écrit de nombreux ouvrages, collabore à des revues, intervient lors de conférences, faisant par là connaître l'art copte. Il n'en demeure pas moins que ses relations avec le milieu égyptologique ne sont pas très bonnes... Est-ce parce qu'il se passionne pour une période qui n'obtient pas grâce à leurs yeux ? C'est vraisemblablement ce qu'il pense alors qu'il envisage : "de mettre en ordre ses souvenirs d'Égypte” sous le titre "Un quart de siècle de luttes archéologiques". 

Mais il n'écrira pas ce livre, et ne verra pas non plus la création de ce musée d'Antinoë qu'il espérait tant ... La maladie le rattrape et il meurt, à Paris, le 9 mai 1916. 

Au décès de sa sœur, qui était son héritière, sa succession et l'attribution de son "legs" constitué notamment d'antiquités, se heurteront à un désintérêt conjugué à une indifférence difficilement compréhensible, qui dureront plusieurs années… 

Du moins "les dix planchettes qu'avait conservées A. Gayet à son domicile sont entrées 'directement' au musée des Beaux-Arts de Dijon". 'Directement' signifiant… 10 années plus tard, soit en 1926 !
Portrait de jeune homme -  Anonyme
Peinture à l'encaustique sur bois - 115 (vers), Trajant (fin)
Legs Albert Gayet -  Musée des Beaux-Arts de Dijon - GA 1 (photo du musée)

Parmi elles se trouvait "une figure de jeune homme aux traits plus fins, aux grands yeux noirs regardant sur le côté, qui donne bien l'impression d'un portrait véritable". Il constitue, très certainement, l'une des plus belles pièces de la collection égyptienne dijonnaise !

marie grillot

sources :
Who Was Who in Egyptology, Bierbier, M., London: Egypt Exploration Society
L'Egypte ancienne au Louvre, Guillemette Andreux, Marie-Hélène Rutschowscaya, Christiane Ziegler, Hachette, 1997
http://www.mtmad.fr/Lists/Ressources/antinoe/01-18907.pdf
http://www.inha.fr/fr/ressources/publications/dictionnaire-critique-des-historiens-de-l-art/gayet-albert.html
L'exploration des ruines d'Antinoé, Albert Gayet,
L'Exploration des ruines d'Antinoé et la découverte d'un temple de Ramsès II enclos dans l'enceinte de la ville d'Hadrien, Albert Gayet, éditions E. Leroux (Paris), 1896
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57769062

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