vendredi 28 août 2015

Jean-François Champollion de Figeac

A Figeac, ville de naissance de Jean-François Champollion, l'artiste américain Joseph Kosuth, a créé la "Place des Écritures" : 
son sol est recouvert d'une grande reproduction de la "Pierre de Rosette", en trois paliers séparant les trois écritures : 
hiéroglyphique, démotique et grecque.

Figeac, ravissante cité médiévale située au coeur du Lot, recèle, dans ses étroites ruelles pavées, bien des richesses architecturales et historiques. L'une d'elles est particulièrement chère à notre coeur : il s'agit de la rue de la Boudousquerie dans laquelle se trouve la maison natale de Jean-François Champollion. C'est au premier étage d'une ancienne bâtisse de pierre, à lourde porte de chêne au beau chambranle surmonté de corniches, qu'est né le 23 décembre 1790 celui qui, 32 ans plus tard, découvrira la clé de l'écriture hiéroglyphique.
Acte de baptême de Jean-François Champollion

Son père, Jacques Champollion, était un colporteur dauphinois ; sa mère, Jeanne Françoise Gualieu, une "figeacoise" assez aisée issue d'une famille de tisserands. Ils ont une trentaine d'années lorsque le mariage est célébré, en 1773, à Figeac. Une partie de la dot servira à acheter cette maison, puis, la prospérité venant, une librairie sera ouverte "place basse" en 1779. La famille s'agrandit de plusieurs naissances, mais celle de Jean-François, alors que la mère a 48 ans, qu'elle est très malade, presque impotente, est un miracle ! Une "légende" circule quant à son incroyable "remise sur pied", survenue après le passage d'un guérisseur. "Cet homme lui fit des frictions avec du vin chaud dans lequel il avait fait bouillir des simples : il lui en fit boire et le troisième jour, elle quitta son lit, radicalement guérie." Il lui prédit qu'elle serait "mère d'un fils qui lui ferait honneur". Jean-François "brun et bien constitué", naîtra un an plus tard !

Même si, par la profession exercée par son père, il devait avoir accès à de nombreux ouvrages, il est souvent rapporté qu'il apprit à lire dans le missel de sa pieuse mère. Jacques-Joseph, le grand-frère de 12 ans son aîné - qui sera toute sa vie son pygmalion -, prend en charge son éducation. Mais, en 1798, déçu de ne pas avoir été retenu pour la campagne d'Égypte de Bonaparte, il décide de partir pour Grenoble où il devient commis dans l'affaire de vins tenue par ses cousins, la "Maison Chatel, Champollion et Rif".

Jean-François vit très mal le départ de ce frère aimé qui, peu à peu, a pris pour lui la place du père. Il se retrouve à l'école primaire communale où il se révèle être un élève difficile, peu doué en orthographe, peu doué en mathématiques. Il ne se fera pas au système scolaire ce qui lui vaut le qualificatif de "discole". Sur intervention de son frère, il en est donc retiré, et son éducation est confiée à un précepteur, Dom Calmet, qui lui enseigne le grec, le latin. Il est étonné, voire décontenancé, par le comportement de son jeune élève. Un comportement rétif et réfractaire à de nombreuses matières alors que, par ailleurs, des dons certains s'affirment pour les langues et le dessin.

Pendant cette période d'éloignement, les deux frères échangent de nombreuses et affectueuses lettres. Jacques-Joseph demeure très attentif au quotidien de son cadet, à ses problèmes, à ses progrès. En mars 1801, il décide de le faire venir à Grenoble. 

Jean-François quitte Figeac, sans regret, tout à la joie de retrouver son frère. Il a alors un peu plus de dix ans et son destin se dessine.

Tout au long de sa vie, Jean-François aura de nombreux domiciles.

Bien sûr, il aimera l'appartement du 56 Grande Rue à Grenoble où il partagera l'intimité de son frère retrouvé.

Bien sûr, il aimera la propriété de Vif, dans la verdure de l'Isère, qui arrive dans la dot de Zoé l'épouse de Jacques-Joseph et qui deviendra la maison familiale.

Bien sûr, il aimera ses domiciles parisiens, le tout premier, rue du Coq Héron, puis celui du 28 rue Mazarine, puis le dernier, celui du 4 rue Favart.

Bien sûr il aimera l'Italie, Florence, Turin, Livourne...

Par-dessus tout, il aimera l'Égypte, tout d'abord "L’Eglé", le navire qui transportera les "argonautes", puis sa dahabieh nommée "Athir", ou bien encore la Maison de France, à Louqsor. Bien sûr, il aimera, sur Thèbes ouest sa terre sainte, le tombeau de Ramsès IV dans lequel il habitera trois mois, puis son "château de Kourna, petite bicoque de boue à un étage"...

Mais c'est à Figeac qu'il reviendra lorsque les temps se feront plus durs, pendant les Cent-Jours, ou bien encore à l'automne 1831 - quelques mois avant que son mal n'empire et ne l'emporte - pour y puiser des forces avant de reprendre ses cours au Collège de France.
A Figeac, Place de la Raison, un obélisque, en granit du pays, a été érigé en mémoire de Jean-François Champollion 

En reconnaissance de cet attachement et en hommage à l'illustre enfant du pays, le conseil municipal réuni le 11 mars 1832 décidera l'érection d'un monument, Place de la Raison. Un obélisque, en granit du pays, haut de près de 8 m, rappelle celui qui : "le premier pénétra dans les mystères de l'écriture et des monuments de l'antique Égypte".

Puis, en 1977, la ville de Figeac rachète, pour un franc symbolique, sa maison natale laissée à l'abandon depuis 1851. Elle en entreprend la restauration et décide d'en faire un musée. Inauguré en décembre 1986, il expose une collection d'objets liés à l'Égypte ancienne et présente la vie et le patient travail de déchiffrement de celui qui "réveilla" l'Égypte. Le musée se consacre maintenant plus largement aux "Écritures du monde" et accueille plus de 50.000 visiteurs par an.

La rue de la Boudousquerie a été rebaptisée "Rue des Frères Champollion". Et, à deux pas du musée, l'artiste américain Joseph Kosuth, pionnier de l'art de l'installation, a créé la "Place des Écritures" : son sol est recouvert d'une grande reproduction de la "Pierre de Rosette", en trois paliers séparant les trois écritures : hiéroglyphique, démotique et grecque. Un obélisque, une reproduction de la Pierre de Rosette : les clés du déchiffrement sont bien là, à Figeac !

marie grillot

Un immense merci à Stéphanie Lebreton, régisseur des collections du Musée Champollion - Les Écritures du Monde, pour son accueil et sa disponibilité
Musée Champollion - Les Écritures du Monde

place Champollion
 - 46100 Figeac

http://www.musee-champollion.fr
mail : musee@ville-figeac.fr

sources :
Jean Lacouture, Champollion, une vie de lumières, Grasset 1988
Musée Champollion : Les lettres inédites de son expédition :
http://www.ladepeche.fr/article/2015/08/28/2166141-des-lettres-inedites-de-son-expedition.html

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire