L'égyptologue Urbain Bouriant (Nevers, 11-4-1849 - Vannes, 19-6-1903) a notamment découvert, en 1882, la tombe de Ramose (TT 55) dans la Vallée des Nobles sur la rive ouest de Louqsor |
Urbain Bouriant naît à Nevers, en Bourgogne, le 11 avril 1849. À la suite de ses classes au collège de cette ville, il se rend à Paris pour des études de droit, mais il les interrompt, en mai 1870, pour s'engager au 4e régiment d'infanterie de marine à Toulon. Il participe ainsi à la campagne contre l’Allemagne. Fait prisonnier, il ne tarde pas, quoique blessé, à s'évader. La paix signée, il part pour la Martinique où il achève son service militaire, avec les fonctions de secrétaire du gouverneur de la colonie.
Urbain Bouriant , égyptologue Nevers, 11-4-1849 - Vannes, 19-6-1903 |
En 1877, à son retour en métropole, marqué par une visite du musée du Louvre à laquelle, rappelle Julien Loiseau, "il attribue sa vocation", il entreprend des études orientales au Collège de France. Son professeur, Gaston Maspero, remarque rapidement ses aptitudes et, lorsqu’en 1880 la France a l'idée de créer une "École d'Égypte" sur le modèle des Écoles de Rome et d'Athènes, il décide de se l'adjoindre car il souhaite s'entourer de "ce qu’il avait de mieux en ce temps".
Le 18 décembre, c'est une Mission Archéologique Française permanente en Égypte qui est établie, sous la direction de Maspero, avec comme collaborateurs : Victor Loret et Urbain Bouriant, les égyptologues, Hippolyte Dulac, l'arabisant, et Jules Bourgoin, le dessinateur.
La mission, arrivée au Caire le 5 janvier 1881, accompagnée de Gabriel Charmes, s'installe dans une maison proche du boulevard Mohammed-Ali. La véritable découverte de l'Égypte débute par la remontée du Nil sur le 'Menchiéh' (qui était le bateau de Mariette), à bord duquel se trouvent le couple Maspero, Gabriel Charmes, Victor Loret et Urbain Bouriant…
La tombe de Ramose (TT 55) - Vallée des Nobles - Rive ouest de Louqsor a été découverte par Urbain Bouriant en 1882 |
Il collabore avec Eugène Lefébure et Victor Loret à dresser le catalogue des momies royales découvertes en 1881 dans la cachette DB 320 à Deir El Bahari (il assistera d'ailleurs, le 1er juin 1886, en présence du Khédive d'Egypte, de Maspero, Brugsch, ... au démaillottage de la momie de Ramsès II).
En 1882, Urbain Bouriant est chargé de diriger des fouilles dans la nécropole thébaine. Il y découvrira notamment la tombe de Ramose, d'un grand intérêt car : "commencée à l'époque où le successeur d'Aménophis III prenait le nom d'Aménophis IV, elle a été continuée durant la partie de son règne où ce prince, qui avait changé de nom, voulait remplacer le culte d'Ammon par celui du disque solaire".
En 1883, il devient l'un des conservateurs adjoints du musée de Boulaq, poste qu'il occupe jusqu’au 1er décembre 1886, date à laquelle le ministre de l'Instruction publique le désigne pour succéder à Eugène Grébaut à la direction de l’IFAO. "L’alliance étroite du Service des antiquités, sous M. Grébaut, et de la Mission du Caire, dirigée par M. Bouriant sous l’inspiration de M. Maspero, fut d’abord des plus heureuses. M. Bouriant, qui s’enfermait dans l’accomplissement de son devoir scientifique, publiait des moissons de documents inédits et ses découvertes perpétuelles,... et ... M. Grébaut surveillait de près l’administration du Service des Antiquités, et poussant activement les fouilles, continuait le déblaiement du temple de Louxor, engageait à fond celui de Médinet-abou...".
Début 1886, lorsque la tombe de Sennedjem (TT1 ) sera découverte à Deir el-Medineh, - il travaillera notamment avec Eduard Toda i Güell, à la lecture des textes hiéroglyphiques.
Ainsi : "pendant près de deux décennies, écrit Julien Loiseau dans le 'Dictionnaire des orientalistes de langue française', avant que de graves problèmes de santé ne le contraignent à rentrer en France, Bouriant poursuit dans son oeuvre personnelle, riche d’une trentaine de titres, l’entreprise de savoir dont Maspero avait dessiné les contours et assigné l’ambition à l’École du Caire : explorer la civilisation de l’Égypte dans la diversité de ses écritures successives, publier textes et documents qu’un long séjour sur le terrain rend seul accessible."
Sur le terrain précisément, Bouriant réalise en 1893-1894, avec Georges Legrain et Gustave Jéquier, une campagnes de fouilles dans la nécropole de Tell al-Amarna, où sont mises au jour les tombes de Khouitatonou. Il publie également les "Papyrus d’Akhmim", des fragments de manuscrits en dialectes bachmourique et thébain acquis par Maspero pour le compte de la Mission archéologique française, ainsi que la traduction, commencée un demi-siècle plus tôt par l’orientaliste Étienne Marc Quatremère, de la "Description topographique et historique de l’Égypte", de l’historien égyptien Ahmad al-Maqrîzî (XIVe - XVe s.), et un recueil de "Chansons populaires arabes en dialecte du Caire, d’après les manuscrits d’un chanteur des rues".
Emporté par la maladie, Urbain Bouriant meurt à Vannes, le 19 juin 1903. Un hommage lui est rendu par Émile Gaston Chassinat, son successeur à la direction de l’IFAO, en ces termes :"L'Institut français d'archéologie orientale est douloureusement éprouvé par la perte (...) de son ancien directeur, M. Urbain Bouriant. (...) Tous ceux qui ont connu M. Bouriant dans sa jeunesse et son âge mûr ne s’attendaient pas à une fin aussi prématurée. Vigoureusement charpenté, actif, l'esprit toujours en éveil, dur à la besogne, il semblait promettre une carrière beaucoup plus longue. (...) Confiant dans sa robustesse, il ne voulait prendre aucun repos et riait volontiers lorsque quelque personne de son entourage, inquiète des progrès du mal qui le minait, lui parlait de se ménager. Enfin les fatigues accumulées d'une vie très rude et bien remplie eurent raison de lui. Il fut frappé d'hémiplégie en 1898, à Paris, alors qu’il venait de rentrer d'Égypte et s'apprêtait à rejoindre sa famille à Lorient. (...) L'égyptologie perd en M. Bouriant un de ses adeptes les plus dévoués ; l'Institut du Caire voit disparaître en lui un directeur qui, après M. Maspero, a le plus contribué à son développement."
Ce rapprochement entre Urbain Bouriant et Gaston Maspero est en effet très éloquent. Maspero écrira pour sa part, dans ses "Lettres d’Égypte" : "Le fait est que Bouriant et moi, à force de travailler ensemble, nous sommes parvenus à nous harmoniser complètement et à utiliser chaque minute de notre temps." S’il note dans le comportement de son ancien élève un tendance à être régulièrement "grincheux", il se félicite surtout d’avoir choisi cet adjoint qui l’ "aide avec ardeur". D’autres collaborateurs, et non des moindres, n’auront pas droit à de tels propos flatteurs de la part du grand Maspero !
Marc Chartier - marie grillot
Dictionnaire des orientalistes de langue française, sous la direction de François Pouillon, Karthala, 2012
Who Was Who in Egyptology, Bierbier, M., London: Egypt Exploration Society
Gaston Maspero, Lettres d'Égypte, Correspondance avec Louise Maspero, Seuil, 2003
Gaston Maspero le gentleman égyptologue, Pygmalion, 1999
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1882_num_26_4_68826
http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/bouriant1903/0001?sid=4675931c5152a4da61c85d83f5651b2e
https://archive.org/details/chansonspopulai00bourgoog
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