jeudi 10 juillet 2014

Lepsius : de Guizeh à Méroé, c'est Philae qu'il a préférée


L’égyptologue, philologue et archéologue allemand Karl Richard Lepsius naît vingt ans jour pour jour après Champollion, le 23 décembre 1810, à Naumbourg, en Saxonie.

Après des études en antiquités grecques et romaines dans les universités de Leipzig, Göttingen et Berlin, il se rend tout d’abord à Paris pour y suivre les cours de Jean-Antoine Letronne, un des premiers élèves de Jean-François Champollion, et étudier la "Grammaire égyptienne" du découvreur des hiéroglyphes ; puis en Toscane pour recevoir les enseignements d’Ippolito Rosellini, qui avait dirigé une expédition conjointe en Égypte avec Champollion en 1828-1829. 

En 1836, il est nommé secrétaire à l'Institut archéologique allemand de Rome. En 1842, il publie une édition du Livre des Morts des Anciens Égyptiens, à partir d'un papyrus qu'il étudie à Turin. 

Cette même année 1842, il est chargé par le roi Frédéric-Guillaume IV de la direction d'une expédition en Égypte qui durera jusqu’en 1845. Il prend soin de choisir lui-même ses collaborateurs pour le relevé des inscriptions hiéroglyphes et des données architecturales et topographiques.

L'expédition commence par une étude du champ des pyramides de Gizeh, où Lepsius découvre plus de 130 tombes privées et les restes de 67 pyramides. Début 1843, pour fêter à sa manière le passage vers la nouvelle année en faisant plaisir aux "enfants du désert", il a l’idée d’allumer un feu de joie au sommet de la Grande Pyramide, puis d’installer dans le sarcophage de la Chambre du Roi... un sapin de Noël avec guirlandes et cadeaux ! 

À Saqqarah, il visite la pyramide à degrés où il démonte les linteaux et les montants d'une porte, où apparaît le nom du pharaon Neterikhet Djeser.

Dans le Fayoum, il découvre le labyrinthe mentionné par Hérodote et Strabon, proche de la pyramide d'Amenemhat III à Hawara. 

À Deir el-Bahari, conformément à une pratique courante dans les milieux de l’égyptologie, il récolte des pièces pour le futur musée de Berlin.

Sur le site de Médinet Habou, il recopie les inscriptions et fait démonter les bas-reliefs... qu'il transportera à Berlin !

De Philae (il considère cette “île sacrée” comme l’un plus beaux souvenirs de son voyage), il part pour l'Éthiopie, en passant par la Nubie et Abou Simbel, espérant trouver les traces d'une civilisation d'origine africaine d’où serait issue l'Égypte des Pharaons. À Djebel Barkal, il continue d’accroître sa collection d’antiquités, avec la statue monumentale d'un bélier représentant Amon, protecteur d'Amenhotep III.

L’expédition se poursuit à Thèbes (relevé des talatats), puis Tell el-Amarna (étude des tombes), avant d’atteindre les villes royales de Méroé. Pour le retour, elle emprunte une autre voie, en se dirigeant vers la mer Rouge et le monastère Sainte-Catherine du Sinaï.

Les résultats de cette expédition sont présentés comme exceptionnels, non seulement pour les relevés topographiques et épigraphiques des sites visités, mais aussi, et peut-être même surtout, pour la collection d’objets originaux qui prendra en 1846, suite à une convention avec le vice-roi égyptien Méhémet Ali, la chemin de la Prusse : en tout, 294 caisses, avec 1 500 objets, des bijoux, des papyrus, des chambres funéraires complètes, des sarcophages, une colonne du temple de Philæ, un obélisque et le sphinx de Djebel Barkal. Les responsables du musée royal de Berlin s’en frottent les mains : ils détiennent désormais l’une des grandes collections d'antiquités égyptiennes. 

Les douze volumes de l’ouvrage “Monuments d'Égypte et d'Éthiopie d'après les dessins rapportés de l'expédition scientifique organisée dans les années 1842-1845 dans ces deux pays sur ordre de sa majesté, le roi de Prusse, Frédéric Guillaume IV” relatent ce long et fructueux périple : ils ne comportent que les tables, le journal volumineux de Lepsius n’ayant été publié qu’après sa mort, notamment par Ludwig Borchardt et Henri Édouard Naville. 

En 1865, Lepsius devient directeur de l’Ägyptisches Museum de Berlin. 

Au printemps 1866, il entreprend un deuxième voyage en Égypte, pour y effectuer des études géographiques dans le delta du Nil. Au cours de ce voyage, il découvre à Sân une stèle trilingue de plus de deux mètres de hauteur et parfaitement conservée, qui fait état d’un décret rendu sous Ptolémée III Evergète, connu sous l’appellation de “décret de Canope”, et rédigé en hiéroglyphique, grec et démotique. L'inscription concerne divers sujets comme la famine, les campagnes militaires, la religion et l'organisation de l'État à l'époque ptolémaïque, en particulier, l'instauration d'un calendrier solaire, le plus vieux connu de l'Égypte antique, comprenant 365¼ jours par an. 

Lepsius est présent en Égypte pour l'inauguration du canal de Suez, en automne 1869.

Il est nommé directeur de la bibliothèque royale de Berlin en 1873. Il occupe ce poste jusqu'à sa mort, le 10 juillet 1884.

Il est considéré comme le fondateur, dans l'espace germanophone, de l'étude scientifique des antiquités égyptiennes, et, plus globalement, comme un fondateur de l’égyptologie moderne.


sources : 
Vidéo : Les aventuriers de l'Egypte ancienne : Karl Richard Lepsius (1810-1884) 

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