Cette statuette est haute de 29 cm et large de 6,2 cm. Elle est datée de l'Époque tardive, de la XXVIe dynastie, des règnes d'Apriès ou d'Amasis (env. 588 - 526 av. J.-C.).
Réalisée en métal cuivreux, selon la méthode de la cire perdue, sa décoration a été gravée dans le modèle en cire. Elle a été ensuite recouverte de feuille d'or mais ce revêtement a malheureusement en majeure partie disparu, laissant à nu la couleur gris-vert du métal.
La facture très élaborée de cette représentation du dieu des Morts est conforme à son iconographie habituelle, associant étroitement son caractère royal et son caractère funéraire.
Il est figuré debout, de manière très "classique", le corps momifié, dans la position "osiriaque" qui est sienne, les bras croisés sur la poitrine. Dans ses mains fermées aux doigts bien dessinés, il tient les sceptres royaux : la crosse heqa et le fouet nekhakha.
Son cou est orné d'un somptueux collier large, de type ousekh, qui a conservé l'éclat de sa dorure. Son visage, plutôt rond, est beau et parfaitement symétrique. Les yeux, cernés de noir, sont étirés d'une ligne de fard. Les cils, épais, sont arqués et épousent la forme de l'oeil. Le nez est de bonne proportion alors que la bouche semble menue. Tenue par une jugulaire, la barbe postiche, joliment tressée et recourbée en son extrémité, orne son menton. Il porte la couronne ourerèt, composée de la mitre blanche allongée de la Haute-Egypte flanquée de deux plumes d'autruche. Sur le devant de la coiffe figure un uraeus dont le corps ondulé s'étire vers le haut.
Son linceul au décor richement orné signe en partie l'originalité et l'aspect "précieux" de cet artefact. Il est ainsi décrit par le Metropolitan Museum : "La partie supérieure de son corps est recouverte d'un motif en filet de perles et un faucon divin est représenté sur le dos, avec ses ailes enroulées autour du bas du corps. A la taille se trouve une amulette en forme de Maât ailée, déesse de l'ordre, qui tient des signes ankh. Un cartouche renfermant le nom d'Osiris orne les genoux, avec à sa base deux cobras portant respectivement les couronnes rouge et blanche. Aux pieds du dieu se trouve un scarabée ailé avec un disque solaire entre les pattes antérieures et un anneau shen dans les pattes arrière. Sur la base se trouvent les neuf arcs, représentant les "ennemis" traditionnels de l'Égypte, ainsi que les hiéroglyphes ankh et djed qui forment un motif sur les côtés et à l'arrière. Sur le devant de la base, le "Prêtre-ouab d'Amon, Padihorpare" est représenté deux fois, mentionné comme "adorant le dieu quatre fois", devant des cartouches contenant le nom d'Osiris avec dans un cas son épithète Neb-Ankh (Seigneur de la Vie) et dans l'autre Khenty-Imentet (Présidant les Occidentaux, c'est-à-dire les défunts enterrés en Occident)".
Dans "Le crépuscule des pharaons", Laurent Coulon souligne que : "Les recensements qui ont pu être faits dans les sanctuaires recevant des ex-voto de tout type, tels que ceux associés aux catacombes d'animaux sacrés, ou sur des dépôts massifs comme ceux du Sérapéum de Memphis ou de la cachette de Karnak, montrent que les effigies osiriennes surpassaient en nombre celles de tous les autres dieux, même quand il s'agissait des divinités locales. Osiris incarnait, par excellence, ce don de vie qui était l'objet même de la consécration d'une statuette par un fidèle"… Dans "Les Portes du Ciel", Florence Gombert précise que, à partir du VIe siècle : "Le dieu connaît une faveur particulière comme divinité renaissante et à l'échelle du pays entier, comme incarnation de la fertilité sans cesse renouvelée par la crue du Nil".
Si l'origine ancienne de cette statuette demeure inconnue, l'on sait que, à la fin du XIXe siècle, elle appartenait à Tigrane Pacha d'Abro. Gendre de Nubar Pacha, cet homme d'État d'origine arménienne fut en outre ministre des Affaires étrangères. Membre du comité d'archéologie du Caire, il constitua une importante collection d'antiquités égyptiennes. Après son décès survenu en 1904, le catalogue en sera publié, en 1911, à Paris, par Daninos Pacha ("Albert Daninos Pacha, Collection d'Antiquités Égyptiennes de Tigrane Pacha d'Abro"). On y retrouve la description de cet Osiris sous le n° 11 et son illustration, en planche 10, montre notamment qu'il a bénéficié d'une belle restauration et que le soclage a été refait.
C'est à New York, auprès du vendeur d'antiquités égyptien naturalisé américain Michel Abemayor, que la statuette a été acquise, en 1956, par le Metropolitan Museum of Art de New York. Elle a été enregistrée dans les collections sous le numéro d'entrée 56.16.2.
marie grillot
sources :
Statuette of Osiris with the epithets Neb Ankh and Khentyimentiu, donated by Padihorpare
https://www.metmuseum.org/art/collection/search/546747
Albert Daninos Pacha, Collection d'Antiquités Égyptiennes de Tigrane Pacha d'Abro, Ernest Le Roux, Paris, 1911, p. 11, pl. 10
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6455586b
Jocelyne Berlandini-Keller, Annie Gasse, Luc Gabolde, Les portes du ciel : visions du monde dans l'Égypte ancienne, Somogy éditions d'art, 2009 (p. 322)
Le crépuscule des pharaons - chefs-d'oeuvre des dernières dynasties égyptiennes, catalogue de l'exposition au Musée Jacquemart-André-Paris, du 23 mars au 23 juillet 2012, Fonds Mercator, 2012 (p. 230)
Laurent Coulon, "Les statues d'Osiris en pierre provenant de la Cachette et leur contribution a l'etude des cultes et des formes locales du dieu", dans La Cachette de Karnak : Nouvelles perspectives sur les decouvertes de Georges Legrain,IFAO, 2016
https://www.academia.edu/27835889/_Les_statues_dOsiris_en_pierre_provenant_de_la_Cachette_de_Karnak_et_leur_contribution_à_létude_des_cultes_et_des_formes_locales_du_dieu_dans_L_Coulon_éd_La_Cachette_de_Karnak_Nouvelles_perspectives_sur_les_découvertes_de_G_Legrain_BdE_161_IFAO_MoA_2016_p_505_563
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire