mardi 27 octobre 2015

Toutankhamon : son nom enfin sur son visage !

à gauche : le masque tel qu’il apparaît à Carter le 28 octobre 1925
à droite : première photo du masque par Harry Burton. 
On remarque l’absence de la barbe postiche.

On se souvient du silence inhabituel qui accueille Howard Carter le 4 novembre 1922 sur son chantier de la Vallée des Rois, silence qui lui fit comprendre : "que quelque chose venait de se passer"...

On se souvient des termes du télégramme qu'il adresse, deux jours plus tard, à Lord Carnarvon : "Merveilleuse découverte dans la Vallée. Tombe superbe avec sceaux intacts. Attends votre arrivée pour ouvrir. Félicitations."

On se souvient de l'incroyable dialogue engagé entre les deux découvreurs ce 26 novembre : alors qu'Howard Carter pratique, dans le coin supérieur gauche de la seconde porte scellée, une ouverture assez grande pour y passer une bougie, Lord Carnarvon lui demande anxieusement : "Vous voyez quelque chose ?”, "Oui, lui répondra-t-il, des merveilles !"

Mais se souvient-on qu'entre l'entrée dans la tombe et la découverte du véritable visage du jeune pharaon, il faudra attendre presque trois années ?

Le dégagement de l'antichambre livrera 700 objets qu'il faudra référencer, protéger, dégager... La porte murée de la chambre funéraire sera démolie le 17 février 1923 et la tombe sera ensuite fermée le 26 février pour quelques mois. Elle rouvrira, puis sera à nouveau fermée en février 1924 en raison d'un désaccord opposant Carter à l'État égyptien.

Mais à l'automne 1925, Carter est à nouveau dans la Vallée des Rois et, début octobre 1925, l'ouverture des quatre chapelles de bois dorés prendra du temps tant elle sera difficile à mettre en oeuvre. "On se cognait la tête, on se pinçait les doigts, il fallait se faufiler partout comme des anguilles et travailler dans toutes sortes de positions pour le moins embarrassantes", explique Howard Carter.

James Henry Breasted restitue l'émotion qu'il ressent alors : "Lorsque avec Carter nous ouvrîmes les portes des troisième et quatrième chapelles et que nous aperçûmes l'énorme sarcophage, je ressentis pour la première fois dans toute sa majesté la présence réelle du pharaon."

Le sarcophage de quartzite rose est recouvert de rangées de hiéroglyphes, et le regard est attiré par les quatre magnifiques déesses qui le protègent. Sculptées chacune à un angle, Isis, Nehphtys, Selket et Neith étendent leurs ailes, entourant ainsi Toutankhamon de leur protection.

Il contient trois cercueils qui seront à ouvrir, avec d'infinies précautions, avant d'arriver ce 28 octobre, à la rencontre tant attendue et espérée, avec la momie de Toutankhamon. "Sous nos yeux, une impressionnante momie, nette et soignée, occupait tout l'espace du cercueil d'or. On avait à profusion déversé sur elle, comme sur son cercueil, des onguents rituels que le temps avait solidifiés et noircis. Sur les teintes sombres et noirâtres dues aux onguents, se détachait, étincelant de magnificence, le masque d'or poli à l'effigie du roi, lui recouvrant la tête et les épaules qui, comme les pieds, avaient été intentionnellement épargnés par les onguents."

Howard Carter est saisi d'admiration face à la beauté du masque : "Le masque d'or battu, un beau et unique spécimen de l'art du portrait antique, porte une expression triste mais calme, suggestive de la jeunesse dépassée prématurément par la mort."

L'équipe est confrontée à un énorme problème : le masque et la momie se sont collés lors de la solidification des onguents. La chaleur leur apparaît être la seule solution afin de les faire fondre, mais elle doit absolument être diffusée de façon à ne pas détériorer les cercueils... Des plaques de zinc, résistantes aux fortes températures, sont installées à l'intérieur du cercueil d'or et plusieurs lampes à paraffine sont allumées. Est-ce utile de préciser que les manipulations s'avèreront aussi délicates que difficiles !

Dès décembre 1922, le Docteur Douglas Derry avait offert son assistance lorsque serait découverte la momie. C'est donc tout naturellement que Carter fit appel à ce professeur d'anatomie de l'Université égyptienne du Caire, ainsi qu'au Docteur Saleh Bey Hamdy, un médecin d'Alexandrie. Ils rejoignirent l'équipe le 10 novembre.

Le démaillotage du pharaon débutera le 11 novembre 1925, dans le couloir d'accès de la tombe de Séthi II, en présence d'Howard Carter, Pierre Lacau, Alfred Lucas, Harry Burton et des deux scientifiques. Puis, le 16, le corps sera extrait de son cercueil. Les résultats de la première autopsie indiqueront qu'à son décès, le roi était âgé de 18 ans, qu'il mesurait 1, 67 m et qu'aucun indice ne pouvait, en l'état, donner d'indication précise sur la cause du décès.

La grande déception de cette grande découverte sera certainement le très mauvais état de la momie. À vouloir trop la protéger, on l'avait finalement irrémédiablement endommagée.
Mais ce n'est pas le visage de la momie elle-même qui restera dans la mémoire collective.

Le visage de Toutankhamon, pour tous, est fait d'or, il resplendit, il ne vieillit pas, il défie le temps , il témoigne de la jeunesse éternelle, et surtout... de l'immortalité. 

marie grillot

sources :
The Tomb of Tutankhamun, Howard Carter
Toutankhamon, Jean Capart, 1923
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5611389t/f60.texte
Toutankhamon, vie, mort et découverte d'un pharaon, Nicholas Reeves, Editions Errance
Toutankhamon et son temps, Petit Palais, Paris, 17 février-juillet 1967, Catalogue par Christiane Desroches-Noblecourt, Ministère d'État Affaires Culturelles
Vie et mort d'un pharaon, Christiane Desroches-Noblecourt, Hachette, 1963


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